Au moins 400 millions de travailleurs à reconvertir: ce que les robots changeront à l’emploi

Le cabinet de conseil McKinsey & Company publie une étude-fresque sur les effets de l'automatisation sur l'emploi d'ici 2030. Les robots et les intelligences artificielles vont-ils rendre obsolètes les humains ? Pas nécessairement. Nous avons sélectionné quatre conclusions majeures après lecture du rapport.

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Au moins 400 millions de travailleurs à reconvertir: ce que les robots changeront à l’emploi

Après l’exode rural et la désindustrialisation, l’automatisation pourrait bien être le prochain grand bouleversement du marché du travail. Et selon McKinsey & Company, cette grande transition est imminente. Le cabinet de conseil a publié le 29 novembre 2017 le rapport intitulé "Emplois perdus, emplois gagnés : les transitions de la main d'oeuvre à une période d'automatisation" pour estimer l’impact de la robotisation et de l’intelligence artificielle (IA) sur l’emploi d’ici 2030.

“Les effets de l’automatisation pourraient être longs à constater à un niveau macro, au sein de secteurs ou d’économies entiers, par exemple. Mais ces effets pourraient bien être plus vifs à un niveau micro, pour des travailleurs dont les activités sont automatisées ou pour les entreprises dont les activités sont disruptées par des concurrents utilisant l’automatisation”, révèle l'enquête.

Contrairement aux idées reçues, les activités physiques ne sont pas les seules concernées par l’automatisation. L’avènement des IA et d’algorithmes pouvant effectuer des calculs ou des activités cognitives complexes menace aussi des professions intermédiaires ou de cadres. L'étude se penche sur les économies de 46 pays qui pèsent pour près de 90 % du PIB mondial. Elle considère plus de 800 occupations professionnelles et prend en compte différents scénarios en fonction de la vitesse d’adoption de l’automatisation par les pays. Parmi les effets estimés, nous avons retenu 4 bouleversements significatifs.

60 % de métiers concernés

Si l’on considère les technologies actuelles, peu de métiers risquent d’être entièrement automatisés. Seulement 5 % à en croire l’étude. En revanche, une majorité de professions connaîtront une automatisation partielle. 60 % des occupations professionnelles verront au moins 30 % de leurs activités robotisées ou prises en charge par l’intelligence artificielle selon l’étude.

Naturellement, les activités les moins concernées par ce risque sont celles qui nécessitent des compétences sociales, émotionnelles, cognitives ou créatives. Les professionnels qui évoluent dans un environnement imprévisibles seront également difficiles à remplacer. McKinsey & Company prend ainsi l’exemple des jardiniers, des plombiers, des gardiens d’enfants ou des aides aux personnes âgées… Des métiers d’autant plus difficiles à automatiser que les niveaux modérés de salaire dans ces professions rendent la robotisation une option moins avantageuse.

A l’inverse, les activités qui se jouent dans un contexte prévisible seront plus aisées à automatiser : les opérations de machines, la préparation de nourriture dans la restauration rapide, la collection et le traitement de données, les métiers de caissier ou de conducteur.

Un exode massif des travailleurs

C’est sans doute l’estimation la plus importante : entre 400 et 800 millions de personnes pourraient devoir chercher un autre travail selon un scénario "médian". Parmi eux, entre 75 et 375 millions de personnes devraient changer de catégorie professionnelle et apprendre de nouvelles compétences.

L’étude se veut rassurante et prend pour exemple l’exode rural : l’automatisation ne se soldera pas (nécessairement) par des humains relégués à l’obsolescence et par un pic fulgurant du chômage. Elle s’accompagnerait plutôt d’une hausse de la demande de travail dans les métiers de l’ingénierie, de la science, de la technologie et de l’analyse. Et les humains seront amenés à assumer d’autres activités aux côtés des machines, sans forcément quitter leur emploi, mais avec davantage de valeur ajoutée. Des métiers encore inconnus aujourd’hui et liés à l’automatisation verront également le jour.

Côté prospective, McKinsey & Company prédit que dans des sociétés vieillissantes, les métiers de la santé seront aussi amenés à recruter. La hausse de la productivité, des salaires et de la consommation créera également une demande de travail chez les artistes et dans le secteur des loisirs. L’investissement dans les infrastructures et le besoin d’améliorer l’efficience énergétique dans un environnement soumis au réchauffemnt climatique pourrait également générer des emplois. Selon l’étude, l’augmentation des salaires, à elle seule permettrait de créer entre 300 et 365 millions d’emplois, grâce entre autres à un un gain de consommation et d'appétence pour les loisirs.

Les pays émergents s’en sortiront mieux que les pays développés

Dans la mesure où les salaires sont plus bas dans les pays émergents, ceux-ci pourraient connaître un dénouement plus positif à l’automatisation que les pays développés. Alors que le Japon connaîtrait 26% d’activités automatisées d’ici 2030, l’Inde s’en sortirait par exemple avec 9%.

Alors que les classes moyennes sont susceptibles de prendre de plein fouet la robotisation dans les pays développés, celles des pays émergents pourraient prospérer avec des besoins de travailleurs accrus dans l’éducation, dans les loisirs, les services financiers ou de télécommunication.

Les dirigeants devront investir

Si le rapport de McKinsey & Company révèle que la robotisation des activités pourra être compensée par la création d’emplois dans d’autres secteurs, les prévisions les plus optimistes du cabinet de conseil reposent sur l’engagement des dirigeants politiques et économiques : “L’histoire montre de nombreux exemples de pays qui ont surfé avec succès sur la vague du changement technologique en investissant dans leur main d’oeuvre et en adaptant les politiques, les institutions et les modèles économiques à la nouvelle ère. Nous espérons que ce rapport incitera les dirigeants à suivre à nouveau cette direction.”

La transition devra ainsi passer par des formations en cours de carrière, une flexibilité du marché à la reconversion et des investissements dans l’éducation. L’effet de cette transition sur le chômage et la productivité dépendra également de l’adaptation des gouvernements, des entreprises et des travailleurs.

“Les gains totaux de productivité que nous estimons n’apparaîtront que si les personnes travaillent aux côtés des machines. Cela va fondamentalement altérer le lieu de travail, requérant un nouveau degré de coopération entre les travailleurs et la technologie”, conclut McKinsey & Company.

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