Aux Etats-Unis, les entrepôts robotisés d'Amazon au cœur d'une polémique sur la sûreté
Une enquête dénonce les conditions de travail des employés d’Amazon dans ses entrepôts robotisés, où le nombre d’accidents du travail serait anormalement élevé. L'entreprise réfute ces accusations en bloc et dénonce un article qui tient plus de l’activisme que de l’investigation.
C’est une enquête qui place une fois de plus Amazon au cœur d’une polémique en matière de respect des conditions de travail au sein de ses entrepôts. Selon un article du site Reveal, édité par The Center for Investigative Reporting, le nombre de blessures graves serait deux fois plus élevés dans les entrepôts robotisés que dans les entrepôts non robotisés de la firme américaine. "Ces installations ont l’un des taux d'accident les plus élevés de tous les entrepôts d'Amazon", résume l’enquête, publiée le 29 septembre.
Dans un long papier émaillé d'extraits de documents internes et de témoignages d'employés ou anciens employés, l’auteur revient sur de graves manquements imputables directement au géant du commerce en ligne. Il cite, à titre d’exemple, le cas d’un centre de distribution situé au sud du siège d'Amazon, à Seattle, et appelé BFI3, qui affiche un nombre de 22 blessures graves pour 100 travailleurs. Soit un taux cinq fois plus élevé que la moyenne actuelle du secteur et supérieur à la moyenne d'Amazon.
14 000 blessures graves en 2019
Ce constat, fruit d’une enquête menée entre 2016 et 2019, s’explique notamment par les cadences effrénées imposées au personnel. Les employés dédiés au picking auraient pour objectif de scanner par exemple 400 articles par heure, au lieu d’une centaine de références au temps où il n’a avait pas de robots dans l’entrepôt. Autrement dit, les robots iraient trop vite pour les humains.
Et ces chiffres produiraient un stress et une fatigue intense, propices à une baisse de vigilance de la part des collaborateurs face aux robots qui traitent les commandes. "Nous avons largement sous-estimé les effets que cela allait avoir sur nos collaborateurs", explique un ancien manager en charge de la sécurité, cité par Reveal. Le rapport note par ailleurs des augmentations d’accidents lors des pics commerciaux, tels que les fêtes de fin d’année ou encore l’événement Prime Day.
En 2019, Amazon aurait enregistré 14 000 blessures graves dans 150 centres de traitement, soit +33% par rapport à 2016. "Un chiffre en constante augmentation d'une année à l'autre", note le site américain, qui accuse également le géant de Seattle d’avoir caché ces chiffres aux autorités.
Reveal accuse par ailleurs Amazon de n’avoir que peu réagi, malgré des anomalies constatées dès 2015 par l’OSHA (Occupational Saftey and Health Administration) qui avait à l’époque formulé des recommandations pour améliorer la sécurité des employés dans un entrepôt robotisé du New Jersey. Parmi elles, l’ajout de temps de pause et la permutation des employés sur différents postes pour éviter les blessures liées au stress, lui-même généré par les tâches répétitives. Selon Reveal, Amazon n’a jamais appliqué ces recommandations.
Une définition qui pose question
"Reveal est mal informé et guidé par un sens de l'activisme plutôt que du journalisme, a réagi Amazon, cité par le média Engadget. Le journaliste interprète mal les données et les documents internes qu'il prétend avoir obtenus". Selon la société américaine, ces données révèleraient même le contraire.
Un outil permettant de mesurer des jours d'absence et un travail restreint ou transféré, connu sous le nom de DART, et considéré par le journaliste comme un incident grave, serait en réalité un indicateur utilisé pour mesurer l’ensemble des blessures, y compris celles qui sont sans gravité, comme une petite foulure ou une entorse. D’ailleurs, Reveal définit une blessure grave comme une blessure ou maladie professionnelle nécessitant des jours d'absence du travail ou une restriction d'emploi. Une définition très large et sujette à interprétation.
"Nous continuons de constater des améliorations dans la prévention et la réduction du nombre de blessures grâce à des programmes d’amélioration de l'ergonomie, de séances de coaching physique et mental, des équipements d'assistance mécanique aux postes de travail, et les équipements de sécurité dédiés aux chariots élévateurs", liste Amazon.
Amazon a beaucoup investi, et communiqué, pour rassurer sur les conditions de travail de ses employés. L’entreprise a aussi consacré des dizaines de millions de dollars pour améliorer la sécurité de ses entrepôts, y compris depuis le début de la pandémie de Covid-19, qui a mis en lumière certains manquements. En effet, la firme dirigée par Jeff Bezos a été plusieurs fois mises en cause pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de ses collaborateurs face aux risques causés par le coronavirus.
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