Blockchain, vous avez dit Blockchain ?

Le numérique ne bouleverse pas que les business models. Pour le prendre en compte, les règles et les lois sont elles aussi en pleine mutation.

Chaque semaine, les avocats Eric Caprioli, Pascal Agosti, Isabelle Cantero et Ilène Choukri se relaient pour nous fournir des clés pour déchiffrer les évolutions juridiques et judiciaires nées de la digitalisation : informatique, cybersécurité, protection des données, respect de la vie privée...

Aujourd’hui, regard sur la technologie blockchain, qui sous-tend la crypto-monnaie Bitcoin : Comment cela fonctionne ? Quel intérêt ? Quels prérequis ?

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Blockchain, vous avez dit Blockchain ?

Blockchain, blockchain ! Toute la Place bancaire mais aussi de nombreux autres acteurs économiques n’ont plus que ce mot-là à la bouche en ce début d’année 2016. De nombreux établissements bancaires et financiers comme Barclays ont ainsi investi dans des Fintech ou des projets de blockchain. Pourtant, ce terme renvoie à une réalité technique, juridique et organisationnelle encore mal appréhendée.

Qu’est ce qu’une blockchain ?

Les définitions sont peu éclairantes. Mais la blockchain est souvent ramenée à un protocole ouvert visant à assurer la gestion décentralisée de l’historique des transactions. L’information est donc disponible dans chaque noeud du réseau, sans passer par un "grand livre" mis à jour quasi instantanément par une autorité centrale En effet, les "blocs" contenant plusieurs transactions sont détenus par les titulaires eux-mêmes et non par une autorité centrale. Ces blocs permettent de garantir à chaque instant l’intégrité et l’authenticité de chaque transaction (c’est-à-dire la cohérence d’une transaction donnée) avec les blocs de chaîne précédents en recourant à des outils cryptographiques, chaque transaction étant vérifiée chronologiquement puis intégrée dans la version N+1 de la blockchain.

Comment fonctionne une blockchain ?

Pour vérifier une transaction, les "mineurs" (en référence aux chercheurs d’or car leur activité crée des monnaies) ou utilisateurs vont se servir de la clé publique jointe par le titulaire à la transaction et vont tenter de résoudre un casse-tête cryptographique. En utilisant un algorithme, ils vont vérifier la correspondance entre une clé publique et la signature du titulaire de la transaction. Une fois le problème résolu, chaque utilisateur du réseau met à jour - via cette validation - sa chaîne de blocs quasi simultanément en y intégrant ce bloc nouvellement validé.

Tout cela peut paraître bien compliqué. Pourtant, ceux qui ont déjà eu à recourir à des crypto-monnaies comme le Bitcoin ne seront pas dépaysés par ce mode de fonctionnement. Ce qu’il faut retenir synthétiquement, c’est que :

1. La blockchain s’appuie sur des mécanismes cryptographiques pour assurer l’intégrité et l’authenticité de chaque transaction, prise séparément mais aussi dans leur ensemble ;

2. Il n’y a pas obligatoirement d’autorité centrale pour gérer le réseau.

Quel intérêt ?

L’intérêt majeur est avant tout financier, notamment en matière de paiement électronique : les coûts des transactions sont diminués, chacune des transactions étant indissociable de son propre historique (et par là infalsifiable). Leur traçabilité et leur sécurité sont donc assurées à moindre coût, c’est-à-dire sans avoir à recourir nécessairement à des systèmes informatiques complexes et coûteux en charge de la supervision des opérations.

Quels prérequis juridiques ?

Le recours à la blockchain met en lumière une nouvelle fois la problématique de l’anonymat des utilisateurs de cette technologie. En effet, ces derniers ne sont techniquement identifiés que par un pseudonyme (adresses attribuées par exemple). Or, la tendance actuelle au niveau européen est à un renforcement de l'authentification forte, notamment en matière de paiement électronique. Le déploiement par les établissements bancaires et financiers de ce type d’outil nécessitera donc de coupler blockchain et authentification.

Ce premier prérequis met en exergue le deuxième : la gestion du réseau. Même si la vérification de chaque bloc de la chaîne de confiance revient à chaque Mineur (membre du réseau) et que l’autorité centrale n’est plus nécessaire, le besoin de connaître ces derniers relèvent d’exigences légales propres à chaque profession. Dès lors, comme pour les offres de Cloud, les offres de Blockchain – caractérisées désormais en fonction des besoins d’une communauté donnée – peuvent être :

- publiques, c’est-à-dire sans restriction à l’entrée (et donc sans prérequis juridiques le plus souvent, comme une identification même sommaire) ;

- hybrides, c’est-à-dire que le processus de sélection du bloc à ajouter à la blockchain est contrôlé par un panel d’organismes (ex : des institutions financières), le droit de lire la blockchain peut être ouvert au public ou restreint à certains utilisateurs. En outre, une Application (API) dédiée pourra être mise en place pour déposer ou vérifier une transaction donnée ;

- ou privées, c’est-à-dire que l’accès au réseau est restreint à certains utilisateurs montrant patte blanche auprès d’une autorité centrale (ex : une banque). La gestion des droits de lire ou de déposer des transactions pourra être répartie par l’autorité

Enfin, la blockchain met en exergue le besoin de disposer de moyens cryptographiques suffisamment fiables pour éviter toute remise en cause de la sécurité informatique du système.

Il convient désormais aux entreprises de déterminer comment se saisir de cet objet technique complexe encore mal connu, puis comment l’utiliser dans des conditions de sécurité juridiques, techniques organisationnelles optimales.

Pascal AGOSTI, Avocat associé, Docteur en droit

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