Céline Ansquer (BNP Paribas) : "La personnalisation de la relation client doit monter en puissance"
Dans un contexte exceptionnel au cours duquel l’usage du digital et la relation client a profondément évolué, Céline Ansquer, Directrice Transformation, Marketing et Digital de la Banque Commerciale en France de BNP Paribas, fait le tour des innovations dont bénéficient leurs clients.
Quelles sont les grandes tendances qui se dégagent dans votre établissement, et plus globalement dans le secteur ?
Céline Ansquer : Tout d’abord, nos clients sont plus actifs sur le digital, et plus nombreux à ne se servir que du mobile, au détriment du desktop. Ils y vont en toute autonomie pour consulter leurs comptes, prendre un rendez-vous ou faire des opérations. Ils se connectent aussi beaucoup plus souvent : plus d’un jour sur deux en moyenne.
Cela s’est combiné avec une sollicitation accrue de nos conseillers pour bénéficier de leurs expertises. D’ailleurs, le nombre de rendez-vous clients a augmenté de 5 %, et 40 % d’entre eux se font à distance. Enfin, l’écosystème des paiements vit aussi une transformation phénoménale. On peut penser au paiement sans contact bien sûr, mais aussi aux paiements sur mobile et en instantané qui se développent très fortement. Tout cela génère de nouvelles habitudes et de nouveaux usages, auxquels nous devons apporter des solutions.
Quelles sont les évolutions en cours au sein de votre banque de réseau et en ligne ?
Nous proposons différents modèles qui nous permettent d’offrir aux clients le meilleur du digital : des experts et des conseillers BNP Paribas ; Hello Bank, une banque totalement digitalisée qui s’adresse plus particulièrement aux "millennials" et freelances ; notre banque privée ; et bien sûr l’accompagnement des professionnels, entrepreneurs et autres clients corporate.
Finalement, toutes ces différentes typologies de clientèle ont les mêmes besoins : du digital, de la simplicité, de l’accessibilité, de l’immédiateté et en parallèle, du soutien, de l’expertise et du conseil. Le compte Nickel s’inscrit aussi parfaitement dans cette proposition de modèle de service, avec un volet hybride. Le dispositif repose sur du digital, mais aussi sur un réseau physique représenté par les buralistes.
Quels sont les chantiers prioritaires ?
Nous devons proposer des solutions qui évoluent en fonction de la situation personnelle de nos clients : agrandissement de la famille, achat d’un bien immobilier, constitution d’une épargne, préparation d’une succession…. Mais aussi en fonction des appétences pour le digital plus ou moins développées selon le profil.
Notre premier enjeu est de continuer à proposer toujours plus de parcours omnicanaux entre le téléphone, l’application, et les agences ; et de pouvoir naviguer entre ces canaux de manière encore plus fluide que le passé. La e-signature, en hausse de 40% sur un an, nous aide d’ailleurs beaucoup dans la dématérialisation des contrats.
Autre axe de développement capital : la personnalisation de la relation client doit monter en puissance. Il faut que si un client nous contacte par téléphone pour une question ou un problème, grâce à de l’intelligence artificielle, il puisse accéder directement au conseiller qui va lui apporter la réponse la plus efficiente possible. Et c’est à nous de diriger le client le plus rapidement possible vers le conseiller adéquat. Nous devons pouvoir faire la même chose avec les emails grâce à la recherche sémantique.
Les petits cailloux que le client sème nous permettent aussi de mieux le connaître pour lui suggérer des informations ciblées au bon moment. Cela peut prendre la forme de bannières personnalises en temps réel sur lesquelles il pourra rebondir, des alertes flash lorsqu’il souhaite être tenu informé du versement de son salaire, d’un éventuel rejet de prélèvement, d’un solde atteint sur un compte…
Vous souhaitez aussi vous développez au-delà des besoins purement bancaires : sous quelle forme ?
En effet, nous voulons capitaliser sur notre réseau de start-up et de partenaires. L’objectif est d’aller au-delà du simple achat immobilier. Nous devons aussi pouvoir proposer des assurances, des aides au déménagement… Tous ces services extra-bancaires visant à aider et rassurer le client.
Cela peut prendre une autre forme avec nos clients étudiants. Ces derniers n’ont pas seulement besoin qu’on leur ouvre un compte avec une carte, et éventuellement un crédit pour leurs études, mais ils peuvent avoir besoin d’aide dans le cadre de leur mobilité, de leur permis de conduire ou de leur caution logement. Nous devons pouvoir aller au-delà du besoin initial pour lequel ils se sont tournés vers nous.
Autre élément-clé : nos collaborateurs et conseillers doivent bénéficier de la même symétrie des attentions. Nous devons être capable de leur proposer un poste de travail aux meilleurs standards digitaux. Par exemple, ils ont accès à ARI, notre Assistant de Recherche Intelligent, dans lequel ils peuvent avoir, en cas de besoin, un rappel sur une procédure, un taux, ou une fiche-produit – de quoi leur faciliter le travail de recherches à travers toutes nos bases de données.
Chaque année, nous enregistrons plusieurs millions de connexions sur cet ARI – c’est notre Google maison ! C’est primordial car les conseillers sont le premier maillon de la relation client. Ces innovations vont les aider à affuter leur expertise et leur accompagnement. Je reviendrai plus en détail sur ces points durant mon intervention le 23 juin lors de la conférence In Banque 2022.
Quels sont les nouveaux enjeux autour de la donnée ?
Avec toutes les données dont nous disposons sur nos clients, nous avons l’opportunité d’être encore plus pertinents, et au bon moment. Nos métiers-clés tournent autour des data-scientists pour travailler au mieux ces modèles et apporter de la valeur ajoutée à cette masse de données. Par exemple, sur l’investissement responsable, nous proposons dans l’application "Mes Comptes" de définir un bilan carbone, car c’est une préoccupation en pleine croissance chez nos clients.
Grâce à la start-up Greenly, qui analyse les opérations sur le compte (voyages, consommation, épargne…), le client peut prendre conscience de son empreinte carbone. Il peut ensuite avoir accès à des contenus pédagogiques, et nous pouvons lui proposer des actions, pour compenser cette empreinte. C’est une illustration, parmi tant d’autres, de ce que nous pouvons proposer, grâce aux données récoltées auprès de nos clients.
Interview menée par l'équipe In Banque en amont de l'intervention de Céline Ansquer à la conférence du 23 juin 2022, dont L’Usine Digitale est partenaire