Comment KissKissBankBank veut permettre à La Banque Postale de bâtir une (autre) banque digitale

La Banque Postale a fait l'acquisition de 100% du capital de KissKissBankBank & Co, pionnier du crowdfunding en France. Ses créateurs comptent profiter du réseau de l'établissement bancaire pour toucher les petites entreprises, les associations et les collectivités territoriales. De son côté, La Banque Postale entend  s'appuyer sur l'expérience digitale de la fintech pour bâtir sa nouvelle offre 100% mobile, prévue à l'automne 2018. Les deux entités prévoient d'ouvrir un incubateur.

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Comment KissKissBankBank veut permettre à La Banque Postale de bâtir une (autre) banque digitale

"A un moment donné, on ne peut plus se battre avec un Opinel alors que nos adversaires sont armés de Bazookas". Vincent Ricordeau, l'un des trois cofondateurs de KissKissBankBank & Co, ne mâche pas ses mots pour commenter le rachat de sa société par La Banque Postale, annoncé ce mercredi 28 juin dans un communiqué de presse commun.

Cette opération, dont le montant n'a pas été dévoilé, devrait permettre à au pionnier du crowdfunding en France de poursuivre sa croissance dans un milieu devenu très concurrentiel et, surtout, sujet à d'importantes mutations où les fintechs ne sont plus les ennemis jurés des banques traditionnelles mais de nouveaux partenaires. Ainsi, trois des principaux compétiteurs de KissKissBankBank sont désormais "backés" par des industriels du secteur : Ulule, est soutenu par la Maif et BNP Paribas, Lendix par BPIFrance et la cagnotte Leetchi a été croquée dès 2015 par le Crédit Mutuel Arkéa.

83 millions d'euros collectés à travers 3 plates-formes

Lancée en 2009, KissKissBankBank & Co s'est d'abord fait connaître avec sa plate-forme de financement participatif KissKissBankBank, dédiée aux projets artistiques et basée sur le modèle du don avec contrepartie. Depuis, la fintech a également lancé la plate-forme HelloMerci, dédiée au financement des projets personnels grâce à des prêts solidaires, et Lendopolis. "Cette dernière plate-forme s'adresse aux entreprises françaises de plus de deux ans. Elles peuvent y emprunter de l'argent avec des taux d'intérêt oscillant entre 5 et 10%", détaille Vincent Ricordeau. Au total, ces trois outils auraient permis à KissKissBankBank & Co de collecter près 83 millions d'euros pour le financement de 27 000 projets. Des chiffres que la jeune entreprise n'hésite pas à avancer pour s'autoproclamer "leader européen du crowdfunding".

En 2016, KissKissBankBank & Co, qui se rémunère grâce à une commission de l'ordre de 5%, a enregistré un chiffre d'affaires de 2 millions d'euros, contre un peu plus d'un million d'euros en 2015. Sur l'exercice 2017, la start-up prévoit de franchir le cap des 3 millions d'euros. Si la plate-forme dédiée aux projets créatifs représente encore la part la plus importante des revenus globaux, c'est aujourd'hui Lendopolis qui enregistre la plus forte croissance. En deux ans, la plate-forme dédiée aux PME a permis de recueillir plus de 12 millions d'euros pour financer 180 entreprises.

des populations visées communes

Un incubateur de start-up dans les cartons

La Banque Postale et KissKissBankBank prévoient d'ouvrir un incubateur de start-up dans le 10ème arrondissement de Paris. Son centre d'intérêt ira au-delà des seules fintechs. "Nous sommes intéressés par tout ce qui est lié à l'indépendance financière et créative de l'individu", explique Vincent Ricordeau. "Nous nous intéresserons aux start-up en phase d'amorçage pour les aider dans leur première phase de développement", ajoute Olivier Levy Barouch. L'incubateur servira aussi de laboratoire d'innovation ouverte pour permettre à La Banque Postale d'anticiper les besoins de ses clients. Cette structure constituera, enfin, un "bon vecteur" pour permettre au groupe d'investir dans la "finance digitale" et la "finance de demain".

 

Après une première levée de fonds de 2 millions d'euros, puis une seconde de 5,5 millions d'euros, KissKiss (son surnom) cherchait un soutien plus important. "On aurait pu lever à nouveau des fonds, mais nos moyens seraient restés disproportionnés par rapport aux autres", confie Vincent Ricordeau. L'entrepreneur mise donc sur La Banque Postale pour amplifier son travail de pédagogie. "Nous avons séduit 1,3 million de Français, mais il en reste 20 à 30 millions à convaincre", estime le cofondateur.

Le spécialiste du crowdfunding espère notamment toucher plus facilement des acteurs comme les associations, les petites entreprises, mais aussi les acteurs territoriaux. Des publics que connaît bien La Banque Postale. "D'ici 12 mois, sur le web et en agence, les agents de La Banque Postale distribueront les plates-formes de KissKissBankBank & Co. Ils vont être formés pour pouvoir réorienter leurs clients vers des solutions alternatives", avance Vincent Ricordeau.

KissKiss, une brique d'un nouvel écosystème digital

De son côté, La Banque Postale explique que cette acquisition s'inscrit directement dans sa stratégie de transformation digitale. "Cette acquisition est la première étape de la constitution d'un écosystème qui a trois jambes", explique Olivier Levy Barouch, directeur adjoint de la stratégie et du développement de La Banque Postale. Cet univers en construction s'articulera autour de KissKissBankBank, d'un futur incubateur de start-up et d'une banque "mobile first", dont le lancement est prévu en octobre 2018.

Plus bavard, Vincent Ricordeau assure que ce rapprochement permettra à La Banque Postale de bâtir une banque mobile qui ne ressemble pas à tous les autres. Et d'affirmer : "La Banque Postale de demain sera très 'kisskissbankisée'. Elle sera axée sur l'expérience de la relation qu'a un individu avec son argent et ses projets, plutôt qu'un catalogue de services qu'il faut vendre".

Collaborer sans perdre son identité

Les 45 collaborateurs de "KissKiss" seront donc amenés à collaborer étroitement avec les équipes digitales de La Banque Postale. Collaboration qui ne sera pas nouvelle puisque les entités travaillent ensemble depuis 2011 autour de différents partenariats. KissKissBankBank & Co conservera, en revanche, son indépendance complète. C'est en tout cas ce que promet Vincent Ricordeau, soucieux de préserver l'ADN de son entreprise. Toutes les précautions semblent donc avoir été prises pour que l'éléphant n'écrase pas la souris.

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