Culturesecrets voudrait être le Netflix de la culture en live
Plus on a de choix, moins il est facile de choisir.
Partant de ce constat appliqué à la multiplication des événements culturels, Krystyna Winckler a crée Culturesecrets.
Cette start-up propose des événements exclusifs à un public d'amateurs, ravis de faire partie d'un club un peu fermé.
En femme d'affaires avisée passée par la Caisse des Dépôts, elle assure son développement avec un modèle économique qui multiplie les sources de revenus.
Christophe Bys
Et si à l'ère digitale, trop de choix finissait par tuer le choix ? Tant et si bien qu'à la fin, certains internautes renonçeraient à leurs achats plutôt que de prendre le risque de faire un mauvais choix et l'expérience d'une déception. C'est sur ce paradoxe que fleurissent les sites et applications qui offrent des services de pré-sélection.
Et c'est le constat qu'a appliqué au monde des arts et de la culture Krystyna Winckler, la fondatrice de Culturesecrets. Cette working girl passé par la Commission européenne, la Conférence des présidents d'Université et la Caisse des Dépôts a connu les affres du choix à faire quand le temps est compté et qu'il est hors de question d'aller voir un mauvais spectacle. Aussi, quand elle a quitté la haute sphère publique pour créer une start-up en avril 2014, elle part avec l'idée de "faciliter la vie des gens dans leurs choix culturels. Ils se sentent englouttis par la quantité d''informations".
l'obsession du business model
Après avoir envisagé de créer un réseau social sur la culture où les membres partageraient le choix, elle renonce vite. "J'étais obsédée par le modèle économique. Je voulais un modèle qui s'alimente de l'intérieur", se souvient-elle. Pas question pour elle de passer par des levées de fonds successives, ce qui excluait les start-up où, en attendant d'atteindre le point mort, les chances de succès sont indexées sur le budget marketing. C'est ainsi qu'est né culturesecrets, dont le point de départ est de pré sélectionner pour un public d'amateurs spectacles, expositions, voire des événements culturels exclusifs.
Cette logique de cercle d'initiés a conduit la fondatrice à créer dans un premier temps un site fermé dont elle choisissait les membres. La démarche a été vite abandonnée. Aujourd'hui, le club est beaucoup plus ouvert. La page web ou l'appli de culturesecrets est structuré en deux parties : l'une est éditorilaisée et comprend une série de choix accessibles à tous les internautes. S'ils décident d'aller à un spectacle, ils peuvent le réserver en ligne, le site possédant sa billetterie et son système de paiement. L'entreprise a noué des accord avec d'autres sites (comme, par exemple, mylittleParis) pour lesquels elle propose des articles sur des événements culturels accompagnés d'un lien.
Des privilèges pour les membres premium individuels...
La deuxième partie est réservée aux membres du club, titulaires d'un pass premium, qui, contre paiement d'un abonnement mensuel de 19 euros, peuvent s'inscrire à un événement gratuit par semaine parmi une sélection proposée par la start-up. Cela peut être aussi bien une place de théâtre qu'une visite de galerie avec l'artiste exposé, une séance de cinéma exceptionnelle ou des rencontres avec des écrivains... Culture secrets revendique avoir noué des relations partenariales avec 50 institutions culturelles, mais aussi avec le centre des monuments nationaux et la réunion des musées nationaux.
Pour affirmer sa crédibilité, la start-up qui compte aujourd'hui 10 salariés, a réuni un comité éditorial regroupant des personnalités comme, par exemple, Jean de Loisy, le président du palais de Tokyo, un haut lieu de la création contemporaine ou Marie Collin, la responsable du Festival d'automne. Pour résumer sa démarche, Krystyna Winckler parle de "démocratiser la culture exclusive". Ou pour le dire autrement, avec Culture secrets, elle augmente le nombre de VIP pouvant accéder à des événements spécifiques.
...Ou pour les happy few chouchoutés par une grande entreprise
D'autant que pour avoir ce business model produisant des recettes récurrentes, les offres développées sont aussi commercialisées d'une autre façon. Le programme premium est proposé à des marques qui l'utilisent pour fidéliser leurs meilleurs clients par exemple ou qui souhaitent témoigner une attention particulière à certaines personnes, clients membres du codir, partenaires... "Nous pouvons co-brander un pass en organisant des événements exclusifs pour l'entreprise, si elle le souhaite", explique la fondatrice. Pour l'entreprise partenaire, l'intérêt est dans les informations qu'elle peut retirer : Culturesecrets possède un CRM restituant des données précises. Krystyna Winckler cite le cas d'une marque de montres de luxe qui n'arrivaient pas à récupérer les données de ses clients. Pas facile de demander l'adresse email ou le numéro de téléphone au moment du règlement d'une montre à plusieurs millieurs d'euros... sauf en offrant un pass grâce auquel la marque récupère les précieuses données quand les clients l'activent.
Actuellement Culturesecrets travaille sur un partenariat avec un groupe de presse pour une offre couplée abonnement et pass. Pour se financer la société a levé 300 000 euros auprès de business angels en décembre 2015 et a signé un accord avec Aéroports de Paris. La prochaine levée de fonds sera pour conquérir des marchés au-delà des frontières. "Notre but est d'avoir un modèle économique qui tourne en France avant de nous développer", assure Krystyna Winckler. Qui a dit que culture rimait forcément avec subventions ?
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