[e-santé] La cour administrative d'appel de Nantes bride la vente de médicaments en ligne

Les locaux du site Pharma-gdd.com, rattachés à une officine de Caen, ont été jugés non conformes par la cour administrative d'appel de Nantes. Au coeur du litige : la localisation des locaux où sont stockés les médicaments vendus en ligne. Ces derniers ne se situent pas à proximité immédiate de l'officine, mais à un peu plus de trois kilomètres.

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[e-santé] La cour administrative d'appel de Nantes bride la vente de médicaments en ligne

Alors que l'e-commerce poursuit sa percée en France (72 milliards d'euros ont été dépensés en ligne en 2016, un montant en hausse de 14,6%), les ventes de médicaments en ligne pourraient, elles, connaître un ralentissement inattendu. L'activité e-commerce de Philippe Lailler, propriétaire d'une officine de pharmacie à Caen et du site Pharma-gdd.com, a été jugée non conforme par une décision de la cour administrative d'appel de Nantes, rendue le 10 janvier 2017.

Un article des années 2000, non adapté aux ventes sur Internet

Face à l'augmentation de son activité en ligne (100 000 commandes traitées en 2016), le pharmacien a ouvert un autre local situé à 3,6km de son officine pour répondre aux nouveaux besoins de logistique. Dans cet entrepôt, déclaré à l'Agence régionale de santé (ARS) de Normandie, le pharmacien exploite actuellement une surface de 1000 m2.

Or, l'article R5125-9 du code de santé publique stipule que les locaux d'une officine doivent former un ensemble d'un seul tenant et que les lieux de stockage peuvent se trouver à proximité immédiate, à condition qu'ils ne soient pas ouverts au public et ne comportent ni signalisation, ni vitrine extérieure. "Mais cet article date de 2000. Il a été créé pour la vente de médicaments au comptoir. A l'époque, la vente en ligne de médicaments n'existait pas du tout", explique Virginie Apéry-Chauvin, l'avocate de Philippe Lailler.

Le Même métier, mais des moyens différents

Le 1er octobre 2014, l'ARS de Normandie s'était appuyée sur cet article pour émettre une mise en demeure auprès du pharmacien, lui demandant de régulariser la situation de son officine dans un délai de neuf mois. Sous peine de sanction financière, le pharmacien décide alors de porter l'affaire devant le tribunal administratif. En avril 2015, celui-ci annule la mise en demeure, estimant que le fait d'avoir des locaux à distance ne pose pas de problème de santé publique.

"La cour administrative d'appel n'a pas eu la même appréciation de l'article", regrette Virginie Apéry-Chauvin. "Les ventes en ligne exigent plus d'espace, notamment pour la préparation des colis", explique-t-elle. L'avocate rappelle que "seuls les moyens diffèrent" et qu'il s'agit bien du même métier : "Pour chaque commande, un pharmacien vérifie que les médicaments mis dans le carton correspondent bien aux médicaments commandés. Le pharmacien remplit également son devoir de conseil, en rédigeant des notes".

L'affaire portée devant le Conseil d'Etat

Philippe Lailler entend se pourvoir en cassation et contester cette décision devant le Conseil d'Etat. "Nous avons un délai de deux mois et avons déjà missionné un avocat au Conseil", précise Virginie Apéry-Chauvin. Ensuite, la plus haute des juridictions de l'ordre administratif devra se prononcer dans un délai de 12 à 24 mois. "En attendant, nous étudions la possibilité d'un sursis. C'est-à-dire la possibilité pour Philippe Lailler de ne pas exécuter la décision de la cour administrative d'appel, tant que le Conseil d'Etat n'a pas statué".

Si l'avis du Conseil d'Etat n'était pas favorable au pharmacien, cela pourrait donc remettre en cause le développement des ventes de médicements sur Internet, qui lorsqu'elles atteignent un certain volume demandent des espaces de taille industrielle, difficiles à installer près des officines, bien souvent situées en zones urbaines. De son côté, le web-pharmacien n'en est pas à son premier revers. En octobre 2013, il avait été sanctionné par un blâme de la chambre disciplinaire de l'Ordre des pharmaciens à Caen pour avoir fait de la publicité déguisée pour son e-officine dans les médias.

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