Hinfact lève 4 millions d’euros pour améliorer la formation des pilotes de ligne
La pépite française Hinfact, qui optimise la formation des pilotes d’avions grâce à l’eye tracking, a bouclé une première levée de fonds de 4 millions d’euros pour accélérer la commercialisation de sa solution et l’étendre à de nouveaux secteurs tels que l'armée, le nucléaire ou la santé.
La start-up toulousaine Hinfact développe depuis 2018 des solutions logicielles qui optimisent la formation sur simulateur des pilotes d’avion en analysant, grâce à un système de suivi du regard (dit "eye tracking"), les mécanismes neuronaux de l’erreur humaine.
Après avoir validé sa technologie et obtenu de premiers contrats, elle annonce, ce 12 avril 2023, une première levée de fonds de 4 millions d’euros. Un mix entre dettes et fonds propres auquel la société de capital risque Innovacom a participé à hauteur d’1,5 million d’euros. Objectifs : accélérer son développement industriel et commercial et étendre sa technologie à d’autres secteurs d’activité.
Un logiciel relié au simulateur et des capteurs dissimulés dans le cockpit
Hinfact est un spin-off du laboratoire de Neurosciences et Intelligence Artificielle de l’ISAE-SUPAERO à Toulouse, qui travaille sur l’étude des forces et faiblesses du cerveau humain. Partant de cette expertise, la start-up a développé une technologie d’eye tracking et une suite logicielle permettant d’améliorer les séances sur simulateur des pilotes de ligne. Ces derniers y sont soumis pendant leur formation, puis environ quatre fois par ans tout au long de leur carrière.
Pour ce faire, elle récolte plusieurs types de données. D’abord, les observations de l’instructeur, notées pendant la session de vol, pour lesquelles Hinfact fournit un support digital optimisé. Ensuite, les paramètres de vol (vitesse, altitude, etc.) récupérées en se connectant au simulateur. Et enfin (c’est le cœur technologique d’Hinfact), les données relatives aux compétences non techniques : la conscience de la situation, la gestion de la charge de travail, le regard du pilote… Elles sont réunies par des capteurs dissimulés dans le cockpit et reliées aux autres données pour savoir où est-ce que le pilote regarde, à quel moment, quel est le niveau de communication entre les deux pilotes sur telle manœuvre, etc.
Les données récoltées permettent ensuite d’adapter les programmes de formation
Exemple grossier : Hinfact détecte automatiquement si, à l’atterrissage, aucun des deux pilotes n’a regardé la vitesse, qui est un paramètre critique, pendant 30 secondes, au cas où l’instructeur, déjà très occupé à paramétrer le simulateur et à prendre des notes, serait passé à côté. "La précision et la multitude d'informations lui permettent de faire un débriefing très complet", ajoute Thomas Bessiere, co-fondateur et CEO d’Hinfact.
Pour compléter la solution et "fermer la boucle", les données récoltées sont ensuite envoyées dans un logiciel SaaS destiné aux responsables de formation. "On propose une analyse à l’échelle de la compagnie aérienne ou de l’école, qui identifie les problèmes et risques récurrents pour qu’ils puissent mettre à jour les programmes de formation en fonction, et de manière conforme aux réglementations", explique le CEO.
Passer l’EBT, la formation par les compétences
Hinfact permet ainsi de de passer à un nouveau modèle de formation qui devient petit à petit un standard dans l’aéronautique : l’EBT (Evidence base training), ou "formation par les compétences". Il se caractérise par le développement et l'évaluation de la capacité globale d'un stagiaire à travers une gamme de compétences de base plutôt que par la mesure de la performance dans des événements ou des manœuvres individuels. L’idée est de former des pilotes qui savent s’adapter à n’importe quelle situation, même sans y avoir été confronté sur simulateur.
Hinfact commercialise sa solution sous forme d’abonnements avec un prix par pilote et par an sur lequel l’entreprise ne souhaite pas communiquer. Elle a signé ses premiers contrats, notamment avec le constructeur aéronautique Dassault Aviation, la compagnie aérienne Corsair ainsi que l’École Nationale de l’Aviation Civile (ENAC).
Pilotes de chasse, opérateurs de centrales nucléaires, chirurgiens…
L’entrée d’Innovacom au capital doit désormais permettre à la start-up d’accélérer son développement commercial, notamment à l’international. "Il y a une très forte demande au Moyen-Orient et en Asie, spécifiquement en Chine et en Inde, où la règlementation vient d’évoluer et enncourage l’adoption de ce nouveau standard de forrmation", détaille Thomas Bessiere.
Le financement doit aussi servir à commercialiser la suite logicielle dans de nouveaux secteurs. "La formation par les compétences se développe partout où il y a des opérateurs de systèmes critiques qui doivent se former régulièrement. Depuis le début, on a développé notre technologie pour qu’elle soit générique et applicable à n’importe quelle industrie. À moyen terme, on pourrait optimiser la formation des pilotes de chasse, des pilotes d’hélicoptères, des opérateurs de centrales nucléaires, des chirurgiens etc.".
L’entreprise emploie aujourd’hui 25 personnes, majoritairement des ingénieurs, des développeurs et des data scientists, et espère doubler ses effectifs dans les années à venir en recrutant de nouveaux profils tech et commerciaux.
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