L'essor de Prédice, le bouquet de services pour les professionnels de santé des Hauts-de-France
L'Agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France pilote un vaste projet de e-santé, Prédice, pour les professionnels de santé et du secteur médicosocial. Un projet d'une ampleur inédite en France. Téléconsultation, télé-expertise, prise de rendez-vous, outils de coordination... Les services se déploient peu à peu, les uns accélérés, les autres ralentis par la crise sanitaire.
Géraldine Langlois
Le programme Prédice, un bouquet de services destinés à améliorer la qualité des prises en charge, la coordination des acteurs de santé et l’accès aux soins, peu connu depuis son lancement mi-2018, s'est retrouvé en première ligne dès le début de la crise sanitaire, en mars dernier.
Les médecins de l'Oise, un des premiers départements touchés par l'épidémie de Covid, souhaitent éviter de recevoir les patients à leur cabinet et interpellent vers l'ARS. En même temps, le gouvernement demande de limiter les consultations physiques dans les cabinets médicaux pour prévenir les contaminations. En quelques jours, l'ARS met à la disposition des médecins de la région l'outil de téléconsultation et de visio sécurisée de Prédice, alors en test.
6 000 médecins, 130 000 téléconsultations
En quelques semaines, l'usage du service explose au point de conduire au quadruplement de la capacité des plateformes de transit des données. Plus de 6 000 médecins s'y sont connecté (gratuitement) durant le premier confinement, moitié moins pendant le second. En tout, indique Gwen Marqué, directeur adjoint de la stratégie et des territoires à l'ARS, "130000 téléconsultations ou visio sécurisées ont été réalisées via Prédice depuis l'ouverture du service". Par des médecins libéraux, bien sûr, mais aussi des sages-femmes, des services de soins pour personnes sourdes et malentendantes, des psychologues hospitaliers ou des professionnels médico-sociaux.
Sur cette lancée, le Groupement d’intérêt public (GIP) "Santé numérique Hauts-de-France", qui assure la maîtrise d'ouvrage du programme, a monté en très peu de temps un outil de télésuivi à domicile des patients malades du Covid. Le prestataire principal de Prédice, Maincare, a paramétré en urgence un questionnaire que les patients volontaires remplissent deux fois par jour. Leur médecin et les autres professionnels impliqués peuvent ainsi suivre l'évolution de leur état de santé à distance et prendre des mesures en cas d'urgence. Pour favoriser l'usage de ces services déployés rapidement, le GIP a mis à disposition des professionnels des tutoriels et une hotline.
Création d'un dossier de coordination régional
Ces deux services ont offert à Prédice une forte visibilité mais le programme se compose de nombreux autres services et outils en cours de construction. "Durant les deux premières années du programme, nous avons travaillé à la mise en place de l'architecture technique", indique Gwen Marqué. Notamment sur l'identitovigilance, stratégique dans le domaine de la santé, l'identification des professionnels, l'authentification et le recueil du consentement des patients, sur lesquels s'appuient tous les autres services.
Par exemple, le dossier de coordination régional, en test à partir des groupements hospitaliers de territoire de Lille, Calais et Amiens. Il permet aux professionnels d'échanger et de partager des données (imagerie médicale, compte-rendus, résultats de laboratoires, etc.), entre eux et avec les patients. Un outil unique en son genre, indique le responsable du projet, qui concerne déjà 600 000 patients. Ou le programme e-RDV, en production actuellement, qui permettra aux patient de prendre des rendez-vous avec des professionnels ou à ces professionnels de prendre rendez-vous pour eux chez des confrères. D'autres services facilitant la coordination seront prochainement proposés : un "chat" sécurisé et un service de télé-expertise qui donnera la possibilité aux professionnels de santé d'échanger sur des cas complexes.
Faciliter les parcours
D'autres projets, "dont les paramétrages ont démarré", selon Gwen Marqué, portent sur la gestion des parcours des usagers, en périnatalité pour les femmes enceintes, en prévention des effets indésirables et interactions néfastes de médicament (iatrogénie) et sur l'appui à la coordination des professionnels des territoire, un sujet particulièrement prégnant dans les zones sous dotées en professionnels de santé et à l'heure où les communautés professionnelles de santé de territoire (CPTS se développent).
Ils disposeront d'un dossier numérique et d'outils de communication sécurisés qui leur permettront de collaborer et d'échanger données et documents sur leurs patients. Tous ces services s'articuleront naturellement avec les services nationaux comme le DMP et la messagerie, précise Gwen Marqué. En revanche, il reste parfois des problèmes d'interopérabilité entre les services de Prédice et les logiciels métiers utilisés par les professionnels, indique-t-il.
Un budget de 24 millions d'euros
La dimension inédite de ce projet réside à la fois dans la diversité des projets déployés et dans sa dynamique de projet : il a mobilisé jusqu'ici plus de 150 personnes, professionnels de santé ou de l'accompagnement, directeurs d'établissements ou d'organisations ou encore responsables de systèmes d'information issus des secteurs hospitaliers, libéral, médicosocial, c'est-à-dire tous les acteurs potentiellement concernés par le bouquet de services envisagés, membres du GIP.
Financièrement, il s'agit aussi d'un gros projet, avec un budget de 24 millions d'euros pour les deux premières années. Une somme financée pour moitié par le FEDER et pour le reste par l'ARS et les établissements participant. En effet, une partie des projets (comme la partie "imagerie" du dossier de coordination) est développée au niveau local directement par les groupements hospitaliers de territoires qui les connectent ensuite à la plateforme et les mettent à disposition des autres.
Pour le moment, les services sont mis à disposition des professionnels dans le cadre de la gestion de la crise épidémique actuelle (et des usagers du système de santé), indique Gwen Marqué. La plateforme n'a pas de but lucratif bien sûr, mais, poursuit-il, "nous travaillons sur un modèle économique pour trouver un équilibre global du projet, en lien avec la maintenance en continu, le service rendu et l'utilisation des services".
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