Le Comité international olympique affiche un intérêt timoré pour la XR

Entre enthousiasme récent pour le jeu vidéo et frilosité face à une technologie immersive encore jeune, le Comité international olympique témoigne de plus en plus d’intérêt à la réalité virtuelle et augmentée. Un an avant les JO de Paris 2024, il reste toutefois prudent.

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Le Comité international olympique affiche un intérêt timoré pour la XR

En juin, un an avant l’organisation des Jeux Olympiques de 2024 à Paris, la cité-État de Singapour accueillera l’Olympic Esports Week. Chapeauté par le Comité olympique international (CIO) et pensé comme un pas supplémentaire vers un rapprochement entre sport et jeu vidéo, l’événement rassemblera des centaines de compétiteurs d’e-sport sur différents titres, dont le simulateur de voile Virtual Regatta, le programme de cyclisme Zwift et même le célèbre Just Dance.

Parmi les absents de la section compétitive de l’événement, se trouvent de nombreux acteurs de la VR et de l’AR, dont des studios de développement. Ces derniers, déçus de ne pas voir leurs jeux parmi les neuf sélectionnés sur lesquels seront organisés des tournois officiels, seront relégués dans une zone accessible au public où ils exposeront leurs projets. Il s’agira pour le secteur de la XR de convaincre le CIO qui, malgré des signaux encourageants, ne semble pour l’heure pas prêt à franchir le cap de l’immersif.

Des discussions en cours avec plusieurs éditeurs

"En matière de compétition, nous n’arrivons pas pour l’instant à visualiser [les tournois en VR et AR], mais nous sommes à l’écoute des différents acteurs avec qui nous avons des discussions", explique à L’Usine Digitale Vincent Pereira, responsable des sports virtuels au sein du département des sports du CIO. Ces derniers mois, plusieurs éditeurs de jeux vidéo en XR lui ont fait parvenir des candidatures dans le cadre de l’Olympic Esports Week de 2023.

Mais les critères du CIO sont nombreux. D’abord, et c’est une condition sine qua non, chaque candidature doit être endossée à la fois par un éditeur et une fédération sportive internationale. Installé à Tel-Aviv où a été conçu Racket: Nx, le studio One Hamsa a ainsi tenté sa chance : son jeu de réalité virtuelle avait été reconnu en avril dernier en tant que discipline sportive officielle par la Fédération internationale de Racquetball.

D’autres ont tenté de conclure des partenariats similaires depuis. En France, la Fédération de tennis de table s’est rapproché il y a quelques semaines de la société américaine For Fun Labs, qui a développé la simulation en VR Eleven Table Tennis. "Nous partageons un enjeu commun, à savoir imposer le jeu et donc le PingVR à l’Olympic Esports Week portée par le CIO […]", a commenté le président de la FFTT fin janvier.

Vincent Pereira mentionne également le jeu en réalité augmentée Hado, aux allures de balle aux prisonniers, et des "discussions à un stade très préliminaire". Selon le responsable olympique, l’éditeur japonais Meleap pourrait voir ses prétentions compétitives se concrétiser s’il se liait à la World Dodgeball Federation.

De multiples critères d’intégration

Un tel soutien sportif n’est toutefois pas suffisant aux yeux du CIO. "Il y a toute une combinaison de critères : la popularité du jeu, l'accessibilité, l'engagement que le CIO pourra générer et également la façon dont le jeu peut se traduire sur scène car nos finales seront organisées en physique", fait savoir Vincent Pereira. Or, sur ces points, la XR doit encore faire ses preuves.

Les jeux en réalité virtuelle et augmentée les plus connus ne peuvent rivaliser à ce stade avec les grands noms de l’esport comme League of Legends et Dota 2. La faute, entre autres choses, à un coût d’équipement moyen bien supérieur pour les joueurs, qui ne plaide pas en faveur de l’idée d’une discipline accessible à tous. Quant aux préoccupations en matière d’expérience spectateur, elles obligent les professionnels de la VR et de l’AR à réfléchir à ce qui doit être montré sur scène et à l’écran pendant un tournoi.

Miser sur une proximité avec le "vrai" sport

Malgré tout, le CIO ne ferme pas définitivement la porte de ses compétitions officielles au secteur. L’institution olympique affirme avoir déjà noué un contrat avec "un sponsor important sur la partie headset", dans le cadre de l’événement de juin. Les simples exposants de Singapour seront d’ailleurs peut-être les organisateurs de tournois esportifs de Paris en 2024. La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a en effet annoncé il y a quelques semaines la candidature de la capitale française pour accueillir, après les Jeux, une nouvelle édition de l’Olympic Esports Week.

La promesse d’activité physique incarnée par la XR enthousiasme d’autre part le comité international olympique. En 2018, Thomas Bach, son président depuis dix ans, estimait que "les jeux VR étaient plus proches de la définition du sport et du mouvement olympique [que les autres jeux] parce qu’ils pouvaient inclure un mouvement."

Bien que le CIO semble aujourd’hui s’être tourné vers des titres jouables sur PC ou smartphones, cette perception est encore partagée. "La promotion de l'activité physique fait partie de notre philosophie depuis toujours", répond Vincent Pereira, évoquant la possibilité via la XR de "créer un pont entre l'industrie du sport et celle du gaming au travers de la technologie". D’autant que les analogues de sports comme Racket: Nx, Tennis Esports ou Eleven Table Tennis collent davantage aux valeurs de l’olympisme que certains titres comme le jeu de tir Counter-Strike: Global Offensive, jugé trop violent.

Le jeu vidéo, vecteur pour toucher les nouvelles générations

L’intention assumée est d’atteindre un nouveau réservoir de jeunes spectateurs, qui s’intéressent de plus en plus aux jeux vidéo sous toutes ses formes. "Clairement, l’Olympic Esports Week et la création de compétitions s’inscrit dans cet objectif : rajeunir les audiences et toucher des publics qui ne sont aujourd’hui pas engagés avec le mouvement olympique", précise Vincent Pereira. Aussi, s’il refuse de composer avec les disciplines esportives en vogue, le CIO mise sur l’innovation et sur une technologie immersive de plus en plus populaire.

Les différentes annonces et sorties d’équipements ou de jeux prévues cette année ont de quoi rendre optimistes ceux qui espèrent un regain de crédibilité pour la XR. Et, dans le même temps, ceux qui comptent sur le sport et l’olympisme pour accélérer la démocratisation de l’immersif.

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