En instituant pour AccorHotels, un shadow cabinet
composé de jeunes cadres de l’entreprise, Sébastien Bazin, son PDG, a mis en lumière une réalité brutale : sauf cas exceptionnels, les jeunes sont exclus des cercles de décisions.
Des jeunes exclus de de la gouvernance
Cette réalité, qui n’est pas propre au monde de l’entreprise (la politique et les syndicats ne font guère mieux) pose une question essentielle : peut-on penser l’avenir d’une organisation en excluant ceux qui l’incarneront ?
De ce point de vue, la création de shadow cabinets de jeunes cadres constitue une bonne initiative car elle permet de mettre la question sur la table.
Sur le plan de la marque employeur, l’annonce, très largement repris par les médias, relève du coup de maître car elle laisse à entendre aux jeunes à potentiel qu’il leur sera possible de compter avant d’avoir des cheveux blancs.
Passer de l’ombre à la lumière ?
Néanmoins, le risque de type d’initiative est de reproduire ce qu’ont fait les partis politiques en créant des "sections jeunes" : acter paradoxalement la mise à l’écart des jeunes. En parquant leurs jeunes dans des sections spécifiques, les partis politiques se sont, consciemment ou non, assurés qu’ils ne viendraient pas troubler les "vraies" instances de décision (en demandant une investiture par exemple).
Cantonnés dans leurs "sections", ces jeunes n’ont ainsi que peu de poids sur l’avenir de leur organisation.
Pour dépasser le succès d’estime, les groupes qui comme AccorHotels mettent en place ces cabinets devront démontrer en quoi leur mise en place a permis de changer les choses.
Demain, des comex intergénérationnels ?
Autre écueil potentiel de ce type de démarche : l’absence d’intergénérationnel. Et de fait, en créant des comités de jeunes, on parallélise la réflexion mais on limite à la portion congrue la confrontation des points de vue pourtant essentielle.
Dans le cadre de mes activités, il m’a été donné de faire participer des jeunes collaborateurs au comité exécutif de leur entreprise. Lorsqu’il me donna son accord, le DG me dit : "Ok mais briefez-les car ils risquent d’être impressionnés à l’idée de s’exprimer devant nous".
Autant vous le dire tout de suite il n’en fut rien… Agacés par la médiocrité de leur équipement informatique et le peu d’ouverture de leur service carrière, plusieurs jeunes salariés ne se privèrent pas de critiquer vertement le statu quo devant le PDG.
Ce dernier me dit à la fin : "on ne m’a jamais présenté les choses comme ça, avant de rajouter, j’attends avec impatience leur prochaine intervention".
@jpouget
Les avis d'experts et points de vue sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs et n’engagent en rien la rédaction.
Réagir