Les gouvernements américain et canadien demandent à leur tour à leurs employés de bannir TikTok
Cinq jours après la Commission et le Conseil européen, Washington et Ottawa ont exigé de leurs employés qu’il suppriment l’application TikTok de leurs appareils professionnels. Les Occidentaux craignent que le réseau social, aux mains du géant chinois ByteDance, ne serve à Pékin à des fins d’espionnage, pour récupérer des données personnelles sensibles.
L’Amérique du Nord emboîte le pas à l’Europe. Les gouvernements canadien et américain ont interdit à leurs employés, mardi 28 février, d'installer l’application de vidéos courtes TikTok sur leurs appareils. Washington laisse trente jours à toutes ses agences fédérales pour supprimer l’application de tout appareil mobile, tandis qu’Ottawa a demandé à ses employés d’agir immédiatement.
Protéger la sécurité du peuple américain
"Ces orientations s'inscrivent dans le cadre de l'engagement permanent de l'administration à sécuriser notre infrastructure numérique et à protéger la sécurité et la vie privée du peuple américain", a déclaré à Reuters le responsable fédéral de la sécurité de l'information aux États-Unis, Chris DeRusha. Les gouvernements nord-américains craignent que le géant chinois ByteDance, propriétaire de TikTok, ne se serve de l’application pour capter les données de leurs citoyens.
L’annonce américaine fait suite à un vote du Congrès en décembre dernier, qui laissait soixante jours à toutes les administrations pour organiser la suppression de l’application des appareils professionnels. Une telle interdiction était déjà en vigueur à la Maison-Blanche ainsi qu'aux ministères de la Défense, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, et dans plus de la moitié des Etats du pays. L’Amérique s’aligne en cela sur la Commission européenne et le Conseil européen, qui ont, le 23 février dernier, demandé à leurs employés de bannir TikTok de leurs appareils professionnels, et de leurs appareils personnels s’ils utilisent des applications d’entreprise. Le Parlement européen doit également se prononcer sous peu sur la question.
Risques d'espionnage
Ces interdictions en série font suite aux révélations de ces derniers mois. TikTok lui-même a reconnu en novembre dernier, à la suite d'une enquête de Forbes, pouvoir accéder aux données de ses utilisateurs. "Nous nous efforçons de limiter le nombre d’employés ayant accès aux données de nos utilisateurs européens, ainsi que le flot de données en dehors de l’Europe et concentrons nos efforts sur le stockage en Europe des données de ces utilisateurs", écrivait à l’époque Elaine Fox, responsable européenne de la protection de la vie privée pour TikTok, selon qui tout se faisait dans le respect du règlement européen sur les données personnelles.
Des enregistrements audio du site américain Buzzfeed avaient par ailleurs montré que des ingénieurs du réseau social avaient eu accès, depuis la Chine, aux données d’utilisateurs américains, entre septembre 2021 et janvier 2022.
Vers une interdiction totale aux Etats-Unis ?
Outre les tensions avec la Chine, l'inquiétude des Occidentaux vient du fait que ByteDance, propriétaire de TikTok, est membre de la Fédération Chinoise des Sociétés de l’Internet. Or, toute société qui en fait partie s'engage à "avoir une confiance totale dans la voie, les théories, le système et la culture socialistes" ainsi qu’à "accepter les conseils, la supervision et la gestion" des autorités compétentes, dont celle en charge d’Internet, l’"administration chinoise du cyberespace".
En conséquence de quoi, les Américains pourraient ne pas s’arrêter là : le Comité des affaires étrangères des Etats-Unis doit voter ce mardi sur une série de textes relatifs à la Chine, dont l’un concerne les protections dont bénéficient les créateurs étrangers de contenus face aux sanctions américaines. Si ce texte passe, il donnerait au président Joe Biden le pouvoir de bannir purement et simplement l’application du pays. Une telle interdiction avait déjà été envisagée en son temps par Donald Trump. TikTok est utilisée par plus d’un milliard de personnes dans le monde, dont plus de 100 millions rien qu’aux Etats-Unis, et 15 millions en France.