Liste noire américaine : le vrai problème pour Huawei, c'est le matériel plus que le logiciel
Le feuilleton Huawei n'a toujours pas de fin en vue. Inscrit sur la liste noire du département du commerce des Etats-Unis, le géant chinois est dans une position particulièrement périlleuse. Outre l'impossibilité d'utiliser les logiciels américains, il se voit privé de composants électroniques clés pour ses produits, y compris provenant d'entreprises japonaises.
Julien Bergounhoux
L'interdiction dont fait l'objet Huawei émane du gouvernement des Etats-Unis et ne concerne techniquement que les entreprises américaines. Mais sa portée est beaucoup plus large dans les faits. De nombreuses entreprises, japonaises notamment, ne vendent pas leurs produits aux entreprises blacklistées par les Etats-Unis par peur de représailles.
Pas de smartphones sans ARM
La relation la plus critique d'entre toutes pour Huawei est celle qui concerne ARM, une entreprise britannique spécialisée dans la conception de micro-architectures et dont la technologie est utilisée par tous les System-on-Chip mobiles du marché. Qu'il s'agisse d'Apple, de Qualcomm, de Samsung ou de HiSilicon (filiale de Huawei spécialisée dans la conception de puces), tous s'appuient sur les architectures ARM. Or ce dernier est depuis 2016 la propriété du Japonais SoftBank qui a lui aussi cessé de travailler avec Huawei.
Les médias se sont beaucoup concentrés depuis le début de cette affaire sur le fait que Huawei ne pourrait plus utiliser la version d'Android maintenue par Google. Et c'est certes un handicap, mais pas insurmontable. Huawei dispose déjà d'une version d'Android n'utilisant aucun service Google en Chine, et l'entreprise s'était préparée à l'éventualité de ne plus y avoir accès à l'international. Son système d'exploitation pourrait s'appeler "Ark OS" en Europe.
Il en va autrement pour le hardware. Etre privé des architectures ARM est un coup fatal pour n'importe quel fabricant de smartphones. Malgré ses ressources, Huawei ne pourrait pas s'en remettre tout de suite, à moins d'enfreindre l'embargo. A noter que cela vaut également pour les ordinateurs. L'architecture x86 des CPU d'ordinateurs ne peut être vendue que par deux entreprises au monde : Intel et AMD, toutes deux américaines. Quant aux processeurs graphiques, ils sont aussi dominés par deux Américains : Nvidia et AMD.
Un accord politique reste la meilleure issue
Au-delà de la conception des puces, les équipements permettant leur fabrication sont aussi concernés. Les Etats-Unis et le Japon sont leaders sur ce marché stratégique et la majorité d'entre eux a déjà coupé les ponts avec Huawei. Cela inclut Electron, le troisième plus grand fournisseur d'équipement de fabrication de semiconducteurs au monde, qui l'a confirmé cette semaine à Reuters. De quoi sérieusement handicaper les efforts chinois pour développer des capacités de production souveraines.
Tout n'est cependant pas noir pour Huawei : TSMC, le plus grand fondeur de puces au monde (Taïwanais), a indiqué qu'il continuera à travailler avec lui. Samsung pourrait en faire de même. Mais de manière réaliste, l'issue la plus viable pour le géant chinois est la fin de la guerre commerciale que se livrent les Etats-Unis et la Chine. C'est ce que prônent l'ensemble des acteurs concernés, la situation risquant d'impacter l'ensemble du marché des semiconducteurs de façon négative.
D'autant que le gouvernement chinois menace lui aussi les entreprises internationales de représailles si elles coopèrent avec l'embargo américain... Or, fabriquer un produit électronique sans passer par la Chine n'est aujourd'hui pas chose aisée. Plusieurs constructeurs, dont Nintendo, ont pris des mesures ces derniers mois pour rapatrier une partie leur production hors de Chine, mais ce genre de processus prend du temps et coûte de l'argent.
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