Pourquoi inventer un OS universel pour objets connectés relève du casse-tête

Après avoir conquis la planète avec Android, son système d'exploitation pour smartphone, Google se positionne désormais sur le marché des objets connectés, avec pour commencer la déclinaison Android Wear dédiée aux technologies "à porter" (comme les smartwatchs). Et pour cause : ce marché promet de dépasser rapidement celui des smartphones. Mais est-il réaliste d'imaginer un OS unique pour une famille d'objets aussi hétéroclites ? Les postulants au futur trône doivent dompter de nombreuses contraintes techniques.

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Qui parviendra à imposer son système d'exploitation comme la référence pour les objets connectés ? La question est sur toutes les lèvres, mais l'on oublie souvent de poser les bases du débat. Avant de s'interroger sur les possibles gagnants de cette guerre naissante, arrêtons-nous sur la fonction d'un OS dans un objet connecté.

Qu'est-ce qu'un OS ?

Un OS (operating system, ou système d'exploitation en français), à quoi ça sert ? "C'est la partie logicielle qui fait l'interface entre le matériel et les applications, résume Claude Chaudet, chercheur à Télécom ParisTech. Le système d'exploitation fournit toute la mécanique nécessaire pour mettre en place les pilotes qui font le lien entre la partie matérielle et la partie logicielle".

Au coeur de l'OS se trouve son noyau (kernel), qui chapeaute les autres programmes, gère leurs droits d'accès et leurs interactions avec le matériel. C'est aussi un socle sur lequel les développeurs viennent programmer leurs applications. "Le système d'exploitation se charge de créer une interface unifiée et fournit aux développeurs un langage standard", explique Claude Chaudet. "Selon les fonctionnalités permises par le noyau, les possibilités de développer des applications sont plus ou moins grandes", ajoute Emmanuel Baccelli, chercheur à l'Inria.

Au noyau s'ajoute une "pile réseau" (protocol stack), qui fait le lien entre les informations reçues du réseau et l'objet. L'ensemble rend celui-ci plus ou moins "maniable" pour les développeurs d'applications.

Objets connectés, une famille décomposée

Qu'il y a-t-il de commun entre un capteur d'humidité, une caméra de surveillance reliée à Internet, une smartwatch Pebble et un lapin Nabaztag ? Pas grand chose mais tous font partie de la même famille : celle des objets connectés, des objets du quotidien dotés d'une dimension communicante.

Découvrez notre dossier "Les 50 objets connectés français"

Pourtant, leur architecture technique, leurs ressources, leurs capacités de mémoire, leurs fonctionnalités sont complètement différentes. "Ce sont les contraintes techniques qui définissent ce qu'est un objet connecté", considère Emmanuel Baccelli. Soit parce que l'appareil est limité en mémoire, en ressources, en énergie par rapport à un ordinateur classique, soit parce que ces objets se fondent dans leur environnement (comme les capteurs coulés dans le béton ou intégrés dans un vêtement).

OS or not OS ?

En partant du constat que l'internet des objets est composé de types de hardware extrêmement hétérogènes, on comprend mieux pourquoi il n'existe pas encore d'OS compatible avec tous les objets connectés. Ce serait comme créer un uniforme unique pour des hommes et des femmes qui s'habillent dans toutes les tailles, du XS au XXL ! D'ailleurs certains objets connectés limités en mémoire et en ressources ne possèdent pas d'OS du tout. Les capteurs les plus basiques et objets connectés dont les fonctions sont limitées n'ont pas besoin d'un OS et puisent dans des librairies simples.

Des besoins particuliers

D'autres possèdent des systèmes d'exploitation propriétaires extrêmement rudimentaires. Mais de plus en plus, des OS sont spécifiquement conçus pour l'Internet des objets afin de fournir aux développeurs un environnement adapté à un matériel "contraint", disposant de peu de ressources et d'un minimum d'énergie. Ainsi, il n'est pas nécessaire de recréer ou de réadapter tout le système pour chaque objet. La plupart de ces systèmes d'exploitation partagent des caractéristiques communes : ils sont "temps réel" ("real time OS"), disposent d'un planificateur de tâches optimisé (pour gérer les ressources du système et optimiser sa consommation énergétique), reposent sur le protocole IPV6, peuvent fonctionner avec un minimum de RAM (moins de 2 kilobytes). Une attention particulière doit être apportée à la sécurité pour que ces objets connectés ne se transforment pas en nids à virus, cet aspect ayant été quelque peu négligé jusqu'à maintenant.

Selon leurs caractéristiques, les OS dédiés peuvent supporter différents types de hardwares et d'architectures, mais à l'heure actuelle, peu sont en mesure de faire tourner tout type d'appareil. L'enjeu pour le futur Google de l'internet des objets est donc de créer un OS universel, capable d'équiper n'importe quel type d'appareil.

Sylvain Arnulf

A lire demain le deuxième volet de notre série : "Objets connectés : un ou deux OS peuvent-ils s'imposer ?"

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