Quand 5 stars de la French Tech plaident pour l'élevage des licornes auprès des députés...
Cinq entrepreneurs français stars, qui ont fondé et/ou dirigent Blablacar, Deezer, Withings, Leetchi, et Sigfox, sont venus plaider la cause des start-up face aux députés de la Commission des affaires économiques.
Manque de financements privés, règlementations franco-françaises, code du travail trop complexe…
Ils expliquent de manière très cash aux parlementaire quels sont les obstacles qui empêchent les jeunes pousses tricolores de devenir des licornes, ces entreprises valorisées plus d'un milliard de dollars.
Lélia de Matharel
29 septembre 2015, dans une salle au sous-sol de l'Assemblée nationale. Un député prend la parole : "Vous avez parlé de désin… Heu..." Coup d'œil vers sa feuille. "Ah, oui, de désintermédiation. C'est bien comme cela qu'on dit. C'est vrai que c'est une menace qui pèse sur l'économie." Les élus présents à cette table ronde, organisée par la Commission des affaires économiques, ne parlent pas encore couramment la langue des invités d'honneur du jour, cinq entrepreneurs qui ont monté des start-up à succès en France (Withings, Leetchi, Blablacar, Sigfox et Deezer).
Tant pis, ils apprendront en écoutant le plaidoyer que ces mousquetaires de la French Tech sont venus leur adresser pour que l'Etat aide les jeunes pousses à devenir des licornes, ces entreprises non cotées en bourse qui pèsent plus d'un milliard de dollars de valorisation.
Bpifrance, crédit d'impôt recherche... Certes, les jeunes start-up sont bel et bien soutenues par la France. Mais lorsqu'il s'agit d'atteindre une taille critique à l'international, c'est une autre paire de manche, affirment en cœur les entrepreneurs.
le 1000 mètres haies
Premier problème : les réglementations devraient être gérées au niveau européen. "L'ADN de nos métiers est international. Nos concurrents ne sont pas de l'autre côté de la frontière, mais à un clic", pointe Céline Lazorthes, présidente et fondatrice de Leetchi (cagnotte en ligne). "Il est ridicule que des députés français se battent entre eux pour rédiger des textes de lois franco-français", s'exclame Éric Carreel, président et co-fondateur de Withings (objets connectés).
"Aux États-Unis, les entrepreneurs courent un 100 mètres, car les textes sont unifiés. Pendant ce temps-là, ici, on transpire à grosses goutes en essayant de réussir un 1000 mètres haies. Blablacar est présent dans 19 pays d'Europe, à chaque fois, il faut analyser, comprendre de nouvelles lois, c'est un enfer réglementaire !", confirme Frédéric Mazella, fondateur et président de Blablacar (covoiturage).
Maudit code du travail
Les entrepreneurs demandent aussi aux députés de dépoussiérer le contrat de travail : "Il faudrait mettre un grand coup de balais pour simplifier ce texte énorme, que personne ne maîtrise", affirme Éric Carreel. "C'est long et difficile de recruter quelqu'un en France, car s'il est en poste, il faut attendre que les trois mois de préavis soit écoulés. Autant vous dire que trois mois, c'est un monde pour une start-up. A Londres, un mois suffit. Nous avons besoin d'un contrat de travail plus flexible", insiste Céline Lazorthes.
Au départ, les start-up n'ont pas de quoi payer de hauts salaires. Elles peuvent donc intéresser leurs salariés au capital et ainsi constituer une équipe solide. "En France, offrir à ses employés des actions gratuites à l'entrée a un coût, c'est dommage. Cela limite les possibilités de recrutement des jeunes pousses…", se désole Simon Baldeyrou, directeur général de Deezer France (musique en streaming).
l'arme fiscale
Les cinq entrepreneurs pointent enfin un problème de financement : "Aux Etats-Unis, il y a 50 fois plus de fonds de capital-risque qu'en France, alors que le PIB du pays n'est que de 6 fois supérieur à celui de l'Hexagone", souligne Frédéric Mazzella. "Les parlementaires ont un rôle à jouer pour structurer cet écosystème, notamment en rendant l'investissement dans de très jeunes pousses plus attractif", poursuit-il. En jouant sur la fiscalité par exemple.
Dans la salle, les députés prennent des notes. Mais pour passer haut la main leur examen de fin d'année en langue des entrepreneurs, gratter du papier ne sera pas suffisant : il va falloir prendre le taureau par les cornes et agir.
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