"Si c’était à refaire, je referais tout, car on apprend de chaque étape", Bénédicte de Raphélis Soissan, Clustree
Nouvelle récompense pour Bénédicte de Raphélis Soissan ! La fondatrice de Clustree a reçu mardi 21 novembre 207 le prix Veuve Clicquot Clémentine 2017, qui récompense la nouvelle génération de femmes d’affaires. La jeune start-uppeuse nous partage ses choix, ses envies, ses conseils, ses projets.
Stéphanie Mundubeltz-Gendron
Vous venez de recevoir le prix Veuve Clicquot Clémentine 2017. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Bénédicte de Raphélis Soissan : Cela représente la reconnaissance d’une valeur qui est très forte chez Clustree, c’est le culot, l’audace, le fait d’oser et de faire des choses hors du commun. J’ai un parcours un peu atypique, j’ai fait des maths appliquées mais à l’université, puis j’ai travaillé dans une association. Donc je n’ai pas de gros logo ni dans les écoles ni dans mes expériences professionnelles. Quand j’ai voulu changer de métier, je me suis sentie un peu enfermée dans ces normes et ces stéréotypes. En France, il faut avoir un parcours spécial, il faut rentrer dans des cases…
Madame Clicquot est quelqu’un qui a une force de caractère, qui est déterminée, qui est audacieuse, qui ne se pose pas de questions : je trouve que ce prix récompense cela. Chez Clustree, on prend des risques, on n’a rien à perdre à essayer et on y va. Ce n’est pas un prix pour moi, mais un prix qui récompense l’ADN de l’entreprise : on n’a peur de rien.
Clustree propose une solution basée sur l’intelligence artificielle pour analyser les CV et améliorer les ressources humaines. Comment expliquez-vous sa réussite?
B. de R. S. : Il y a le culot, l’énergie, la passion. Et on porte une mission vraiment chevillée au corps qui résonne chez beaucoup de gens. On veut casser les stéréotypes. L’objectif, c’est d’utiliser la technologie, l’intelligence artificielle pour faire en sorte que les ressources humaines soient plus humaines. Il y a une vraie nécessité de faire changer cela.
Comment avez-vous choisi votre équipe ?
B. de R. S. : J’ai recruté beaucoup de gens techniques au départ pour développer tous les algorithmes et ensuite, j’ai choisi des gens qui ont une envie d’apprendre très forte et qui ont le feu dans le ventre. Ce ne sont pas forcément des personnes qui ont 50 diplômes et 50 compétences. On recherche des gens qui ont envie de porter cette mission avec nous, qui sont astucieux dans leur façon de résoudre les problèmes, plutôt que des gens qui appliquent à la lettre des schémas établis. Aujourd’hui, on est presque 30 personnes. On va être 50 d’ici le début d’année prochaine. On recrute pour des postes de sales, de tech, de satisfaction client, de designers, de managers… L’équipe grandit.
Quels sont les grands projets à venir de Clustree ?
B. de R. S. : Nous souhaitons aller beaucoup plus loin sur le produit. On a des ambitions fortes pour l’étendre notre solution et d’être demain capable de couvrir toutes les étapes du cycle de vie d’un collaborateur : recrutement, mobilité, formation, plan de succession, compétences, départ, changement de poste… Ensuite, nous visons l’expansion à l’international, en commençant par les Etats-Unis. C’est la prochaine grand étape, dans 12 mois à peu près, quand le produit sera prêt.
Si c’était à refaire, que changeriez-vous ?
B. de R. S. : Je referais tout car on apprend de chaque étape. J’ai fait plein d’erreurs, mais c’est aussi comme ça que j’avance. J’aurais sans doute communiqué beaucoup plus tôt avec mon équipe de manière plus transparente. J’ai eu tendance à penser pendant très longtemps que je devais être celle qui garde le navire dans la bonne direction et quand il y avait des bas, je ne partageais pas avec eux nos difficultés. Or, quand on a un problème que l’on partage, l’équipe fait corps autour de nous et nous aide encore plus. On n’est pas obligé de la protéger tout le temps. Au contraire, Les collaborateurs attendent une parole libérée. Par exemple, quelle est la stratégie de l’entreprise sur les 3 prochaines années : c’est quelque chose qui leur parle beaucoup, ils ont besoin d’avoir cette visibilité-là.
Quels conseils donneriez-vous aux start-up qui se lancent ?
B. de R. S. : Première chose : il faut avoir un sujet qu’on a envie de résoudre, et chevillé au corps. Il ne faut pas que ce soit l’entrepreneuriat la vocation. Le projet qu’on lance ne doit pas être l’occasion d’entreprendre. Il faut qu’on ait envie de résoudre un problème et que le seul moyen de le faire, ce soit d’entreprendre, et non pas l’inverse. Sinon on ne réussira pas à se battre tous les jours. La deuxième chose, c’est de raisonner dès le début en se confrontant au marché, pas attendre d’avoir un produit pour aller le vendre et s’assurer qu’on a un "product market fit ".
Et aux start-uppeuses ?
B. de R. S. : Il faut qu’elles restent elles-mêmes. On a tendance à penser que comme il y a beaucoup d’hommes dans les investisseurs, les entrepreneurs ou les équipes techniques, les femmes doivent changer leur comportement. Donc beaucoup de femmes n’osent pas. Mais il faut arriver comme on est, avec son style et faire en sorte de s’adapter tout en restant authentique.
Ensuite, une fois qu’elle s’est lancée, une femme rencontre les mêmes difficultés qu’un entrepreneur homme, donc il n’y a pas de difficultés particulière à entreprendre parce qu’on est une femme. Bien au contraire, Il faut juste se lancer et ne pas se mettre de frein.
Le secteur de la tech est actuellement décrié pour ces problèmes d’égalité homme-femme ? Quel est votre regard ?
B. de R. S. : Il n’y a pas beaucoup de femmes dans la tech car il n’y a pas beaucoup de femmes ingénieurs. Et peu de femmes, après l’école d’ingénieur, se disent : "je vais en faire mon métier". Elles vont plutôt faire de la recherche que travailler dans les start-up et faire du code. Une des façons de résoudre le problème, c’est d’apprendre à coder dès l’enfance. Le projet de Magic Makers est d’ailleurs hyper intéressant, car cela permet d’arriver avec les mêmes armes.
Vos envies, vos projets ?
B. de R. S. : C’est d’emmener cette entreprise le plus loin possible, essayer de repenser complètement la façon dont on fait les RH et d’être une des rares start-up françaises à avoir une ambition à l’international et avoir envie de s’exporter. En France, on a beaucoup de complexes. C’est un merveilleux pays pour commencer à entreprendre mais le problème, c’est que c’est trop grand pour partir tout de suite et trop petit pour y rester plus tard. Donc on ne raisonne pas souvent international et je pense qu’il faut qu’on ait moins de complexe.
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