[Tribune] Connecter pour connecter : quels écueils à éviter ?
Le CES 2019 et le MWC 2019 sont désormais terminés et un bilan s’impose : malgré la promesse récurrente des industriels, les objets connectés n’ont toujours pas trouvé leur public. Trop chers, souvent inutiles, sans écosystème viable, ces derniers doivent rapidement évoluer pour trouver une place de choix dans les foyers des consommateurs plutôt que dans les stocks invendus des industriels. Par Benoit Petit, Président d'IAC Partners, cabinet de conseil en stratégie.
Un concurrent occupe déjà la place : le smartphone
Il est d’usage pour les industriels de voir l’objet connecté comme la solution à tous les problèmes du quotidien. Consulter rapidement mes emails ? Merci la montre connectée ! Connaitre les repas que je peux préparer ce soir ? Merci le mixeur connecté ! Connaitre mon nombre de pas ? Heureusement, mon bracelet me l’indique ! Tous ces cas d’utilisation se heurtent néanmoins au réel, la grande majorité des fonctionnalités que nous attendons des objets connectés sont déjà présentes dans notre poche. Autrefois simple outil de communication, le smartphone occupe désormais une place de choix dans notre vie quotidienne. A quoi bon payer un autocuiseur deux fois plus cher, quand la majorité des fonctionnalités ‘novatrices’ sont déjà présentes dans le creux de ma main ?
La proof of concept, ou ce que va faire le consommateur de mon objet
Pommeau de douche, fourchette ou encore papier toilettes sont des exemples de produits connectés développés à des fins de belle technique plutôt que de bénéfice client. Ils sont plus chers, mais à quoi servent-ils ? Les tentatives pionnières dans l’IoT ont souvent été couronnées… d’échecs. Pourtant, une étude en amont et l’élaboration de prototypes permettra de valider au plus vite les caractéristiques essentielles pour les consommateurs. Amazon a par exemple bien compris que pour se différencier, développer une énième enceinte connectée ne suffisait pas. Il fallait créer de la valeur pour le consommateur : l’intégrer dans un écosystème (e-commerce, partenariats avec d’autres service), proposer des fonctionnalités innovantes (assistante vocal) mais surtout, s’adapter aux nouveaux usages !
Ce dernier point est sans doute le plus crucial pour les industriels. Un objet connecté, n’est pas une pièce inamovible condamnée à subir les avancées technologiques, il se doit de les précéder. Revenons-en à notre enceinte connectée, les fabricants ne se battent désormais plus sur la partie hardware, mais sur le software et l’intégration au sein de la routine des usagers : qui sera le premier à proposer Apple Music ? Qui intégrera une interface permettant de contrôler toute la domotique ? Mais surtout, qui proposera des innovations tout au long de la durée de vie du produit ?
Connecter ses objets, loin d’un effet de mode, un enjeu pour tous les industriels
L’IoT passe aussi par une refonte des business models des industriels. Les consommateurs n’achètent plus seulement un produit, mais un service. Cela constitue une véritable opportunité pour qui saura capter cette création de valeur. Prenons le cas d’un fabricant d’ampoules, en les connectant il sera en mesure de proposer automatiquement un réachat automatique de ces dernières, d’affiner sa connaissance du consommateur en collectant - et revendant - les données) mais surtout de créer un véritable maillage : intégration aux différentes enceintes connectées, partenariats avec les fournisseurs d’énergie, etc.
L’IoT va donc au-delà de la belle technique et des innovations « startup-iennes » spectaculaires mais sans marché réel proposées lors des grands évènements (CES, IFA, etc.). Les industriels commencent à saisir les étapes nécessaires pour réussir le développement d’un objet connecté : innover certes (business model et produit), mais surtout valider la valeur perçue pour le client en étudiant les usages et en repensant le cycle de vie du produit. En somme, connecter les objets en se connectant au client.
Par Benoit Petit, Président d'IAC Partners, cabinet de conseil en stratégie
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