Contraint à l'open data, le transport public attend des standards
Les compagnies de transport ne semblent pas toujours ravies de devoir ouvrir toutes leurs données.
Mais deux lois - Macron et Lemaire - vont coup sur coup les obliger à accélérer un mouvement déjà largement amorcé.
SNCF, RATP, Keolis, Transdev. Les principaux opérateurs ont déjà ouvert une partie de leurs données. Mais cela reste insuffisant au regard des deux lois, qui vont changer la donne pour l’Open data dans le transport.
Pour pousser des start-up à proposer des services innovants, un amendement de la loi Macron — dont le décret d’application devrait tomber dans les prochaines semaines — demande aux transporteurs d’ouvrir les données concernant les horaires, les tarifs, les incidents, les informations sur les calculateurs de trajets multimodaux.
Une suite logique au rapport "Ouverture des données des transports" ou rapport Jutand, du nom du président du comité, remis en mars dernier au secrétaire d’État aux Transport, Alain Vidalies. Il posait pour la première fois que l’open data n’était pas un choix pour les transports publics. Depuis, le cas des opérateurs de transport public s’est aggravé avec le projet de loi pour une république numérique, proposée par la secrétaire d’État chargée du Numérique, Axelle Lemaire, dont l’un des 30 articles introduit la notion de données d’intérêt général, qui concernerait aussi les entreprises financées ou en régie avec l’État.
Beaucoup de communication
Une ouverture qui ne réjouit pas forcément les compagnies de transport, même si elles ont franchi le pas de l’Open data. La SNCF a ouvert une partie de ses données depuis 2012 et même en temps réel. Keolis a été "le premier à ouvrir ses données dès 2010 à Rennes", précise Laurent Kocher, directeur exécutif marketing, innovation et services du groupe Keolis.
Dès juin 2012, la RATP ouvrait également une partie de ses données : l’enchaînement des stations de métro sur une ligne, les plans de métro avec les couleurs des lignes, Quelques mois plus tard, l’Epic "a considérablement élargi son offre avec un jeu de données sur l’affluence et la géolocalisation des stations, important pour évaluer un fonds de commerce, rappelle Dominique de Ternay, directeur marketing RATP. Et, plus important, en mai 2013, nous avons ouvert la totalité de l’offre transport et notamment tout ce qui permet de développer une offre de calcul d’itinéraire complète. Cela se chiffre en millions de données qui sont remises à jour automatiquement toutes les trois semaines. Elle prend même en compte la disponibilité prévisionnelle des conducteurs ou des machinistes".
La RATP a, il est vrai — depuis l’histoire du plan de métro dont, en 2012 encore, elle interdisait la reproduction —, montré une certaine ouverture d’esprit pour favoriser le développement de start-up ou aider des PME, en leur donnant libre accès à ses brevets.
Quid des API
Depuis près d’un an, les sociétés de transport discutent entre elles pour se mettre d’accord sur l’Open data, mais il semble que les voix diffèrent selon les sources.
"Aujourd’hui, les discussions portent essentiellement sur la mise en place d’un code de conduite. L’ouverture des données, c’est bien, l’ouverture des API (Application programming interface) c’est mieux. Il faut packager les données avec une intelligence de calcul. Cela a plus de valeur. Chez Keolis, cela fait plus d’un an que nous avons ouvert les API", précise Laurent Kocher.
Chez Transdev aussi, on souhaite une véritable ouverture, mais on attend un format standardisé. "Sur la disponibilité des données, on ne fera pas d’agrégation de données, tant qu’elles ne sont pas disponibles et à un format standardisé. Il existe des problèmes de formats disparates, prévenait Yann Leriche, directeur performance et numérique chez Transdev, lors d’une conférence de presse organisée par Transdev, le 22 septembre. On n’a pas avancé assez vite. Les discussions avec la SNCF piétinent. Les API changent tous les quatre matins. La SNCF ne veut pas donner les données sur les TGV."
Ouvrir, mais pas n'importe quoi ni n'importe comment
Impossible d’avoir la réponse de la SNCF. L’opérateur historique ne souhaite pas s’exprimer sur le sujet de l’ouverture des données et des futures lois pour le moment. Pourtant, il s’est plutôt montré volontaire dans ce domaine.
À la RATP, on semble avoir trouvé la parade. "Nous avons cherché à être partie prenante de l’ouverture des données en faisant migrer nos données d’un format propre à l’entreprise vers le format GTFS (General Transit Feed Specification)".
Toutefois, les opérateurs ne souhaitent pas tout ouvrir. "On est tous d’accord pour ouvrir nos données sur les perturbations, mais pas n’importe comment", indique-t-on à la RATP. La crainte est de voir certaines personnes s’en servir de manière partielle en oubliant de réactualiser l’incident quand il est terminé et de conseiller un mode de transport concurrent avec le nom d’une entreprise, comme une compagnie de taxi.
Olivier Cognasse
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