Emploi dans le numérique : les reconversions, un potentiel sous-exploité selon l'Institut Montaigne

Pour répondre à la pénurie de candidats dans les métiers du numérique d'ici à 2030, le think tank estime qu'il faut mettre l'accent sur les formations en reconversion, l'attractivité auprès des femmes, et l'apprentissage du numérique au collège et au lycée.

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Emploi dans le numérique : les reconversions, un potentiel sous-exploité selon l'Institut Montaigne

L'Institut Montaigne, un think tank à tendance libérale, publie ce 23 mai une étude et des propositions pour résoudre la pénurie sur le marché de l'emploi dans le numérique. Son étude estime qu'il faudra former 845 000 personnes entre 2023 et 2030 afin de pourvoir les 1,6 million d'emplois estimés dans le secteur à cet horizon (développement, IA, data, infrastructures, cloud, réseaux, data centers, maintenance, support, création, management, marketing, commerce, conseil).

Pas assez de candidats formés pour satisfaire les besoins

Or, sur les 945 000 emplois disponibles dans ces métiers en 2022, près de 10% n’étaient pas pourvus. Les tensions sont particulièrement perceptibles dans la cybersécurité, où seules 25% des offres d’emploi ont été pourvues en 2021. Par rapport aux objectifs fixés par le chef de l'État, qui étaient de former 400 000 personnes supplémentaires entre 2023 et 2027, l'Institut estime qu'il faudrait relever ce chiffre de 20% pour soutenir la demande des entreprises.

Il y a donc du travail, pour répondre à la fois aux créations d'emplois (qui représenteront 72% des besoins d'ici 2030) mais aussi aux départs naturels. "L’offre de formation est largement sous-taillée aux besoins et doit doubler à horizon 2030 pour répondre à un besoin de formation estimé à 478 000 personnes sur l’ensemble du quinquennat", écrit le think tank qui formule douze propositions pour renforcer l'attractivité des métiers, l'offre de formation et les capacités de pilotage de la France.

Inciter candidats et entreprises à recourir à la reconversion

La première est de mener une campagne de communication nationale pour attirer les femmes (que l'Institut estime représenter moins de 20% des effectifs) et les candidats à la reconversion. "Les métiers du numérique n'exigent pas tous des études supérieures scientifiques et pourraient rapidement s’enrichir de profils diversifiés", explique l'Institut Montaigne. Il ajoute que le développement du no code et du low code va progressivement "décharger certains métiers numériques d’une part du travail technique, par exemple l’écriture de code informatique, et inciter à développer d’autres compétences".

"Ces 'talents cachés' regroupent des profils très diversifiés, dont le CV ne coche pas d’emblée les cases pour une carrière dans le secteur du numérique. Il peut s’agir de profils ayant effectué une formation non numérique, scientifique, littéraire, économique ou juridique ; de profils éloignés du marché de l’emploi depuis longtemps pour des raisons familiales, personnelles ou de santé ; de profils à différents stades de leur carrière professionnelle, y compris en milieu voire en fin de carrière", poursuit le think tank, qui estime qu'il faudrait doubler les contingents en reconversion chaque année d'ici 2030 pour passer de 30 000 à 55 000 personnes.

Pour cela, il suggère notamment de communiquer sur les reconversions réussies. L'étude cite par exemple le cas d'un ancien chauffeur de poids lourds reconverti chez Capgemini Engineering en tant que Software Engineer, d'une ancienne responsable RH devenue développeuse Cobol chez IBM, ou encore d'une mère au foyer, diplômée d'école de commerce, reconvertie dans la cybersécurité chez IBM Cloud for Financial Services.

"Trop souvent les entreprises recrutent uniquement des profils d’ingénieurs formés à niveau bac +5, y compris pour des postes qui seraient satisfaits par des profils à niveaux bac +2, bac +3, et en sortie de reconversion", note le rapport. Certains métiers du numérique seraient particulièrement adaptés à des reconversions, tels que ceux de la gestion électronique de documents, de la création de sites et d’applications, du montage audio et vidéo, du graphisme, du développement et de l'infogérance.

Plus d'éducation au numérique de la 5e à la 2nde

L'Institut Montaigne propose également d'instaurer, d’ici à la rentrée 2026, un parcours de 1h30 par semaine de formation au numérique de la classe de 5e jusqu'en seconde, afin d'aller plus loin que ce qui a déjà été mis en place, notamment avec la certification Pix et les enseignements optionnels au lycée (qui ne sont disponibles que dans 64% des lycées, et c'est d'ailleurs une autre proposition que d'offrir la spécialité "Numérique et sciences informatiques" dans 100% des lycées en 2025). Ces mesures contribueraient selon le rapport à faire passer le nombre de diplômés du numérique de 40 000 à 75 000 étudiants chaque année.

D'autres propositions consistent à adapter plus rapidement le système de formation. Cela passe par la création d'un guichet unique au sein de Pôle Emploi pour la formation continue, et par la réduction des délais d'accréditation des formations aux métiers les plus en tension. Ce qui nécessite une modification de la loi encadrant France Compétences, car aujourd'hui, tous les dossiers doivent être traités dans l'ordre de leur date de dépôt, quelle que soit leur priorité.

Une GPEC à l'échelle nationale

Enfin, l'Institut Montaigne propose une gestion stratégique nationale des emplois et des compétences, "afin d’identifier les tensions présentes et à venir et d’ajuster l’appareil de formation à l’échelle du territoire", en "agrégeant les données utiles selon un référentiel commun".

À terme, cette gestion serait confiée à une instance nationale qui réunirait France stratégie, France Compétences, France Travail, les ministères de l’Enseignement supérieur, de l'Éducation nationale et de l’Agriculture, et qui travaillerait en collaboration avec les régions sous la tutelle de la Délégation générale à l'Emploi et à la Formation professionnelle, ou bien de France Compétences.

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