Fiscalité des géants du numérique : la Commission européenne avance ses pions mais il faudra être patient
La Commission européenne a précisé ses projets en matière de taxation des nouvelles activités numériques.
Ce projet comporte une taxe intermédiaire en attendant une révision plus profonde des règles d'imposition des entreprises.
Reste à obtenir un accord de l'ensemble des pays membres.
Ne dites pas que la Commission européenne veut taxer les Gafa, elle s’en défend. Le projet qu’elle a présenté ce mercredi 21 mars vise à revoir les bases de la « fiscalité de nouvelles prestations de services, pas de nouvelles entreprises » expliquent les responsables qui ont participé à ce projet. Alors que les Etats-Unis font peser des menaces de guerre commerciale sur l’économie mondiale, la Commission ne souhaite pas que ce projet de taxe sur lequel elle planche de longue date puisse être considéré comme une réplique. Elle a d’ailleurs indiqué que seulement une moitié des entreprises qui y seront assujetties sont des ressortissantes des Etats-Unis, un tiers sera représenté par des entreprises européennes, le solde étant essentiellement constitué de firmes asiatiques.
Taxer le chiffre d'affaires et plus le résultat
Le projet présenté par le commissaire européen à l’Economie Pierre Moscovici prévoit une taxe de 3 % qui portera sur les revenus de certaines entreprises numériques, et non sur le résultat comme il est d’usage. La raison en est connue : les entreprises numériques internationales ont su développer de véritables compétences juridico-comptables pour que le résultat qui sert de base fiscale et le résultat économique déclaré dans chaque Etat ne coïncident pas toujours. Si cette pratique n’est pas propre aux entreprises numériques, la nature « virtuelle » de leur activité facilite ce tour de passe-passe, qui fait perdre à de nombreux Etats des recettes fiscales.
Seules les entreprises réalisant un chiffre mondial de plus de 750 millions et réalisant des revenus au sein de l’UE au-dessus de 50 millions seront concernées par cet impôt nouveau, impôt qui, dans tous les cas devrait être provisoire.
Rien avant 2020... si tout va bien
Dans les couloirs de la Commission européenne, il se dit que dans le meilleur des cas, le nouvel impôt s’appliquera pour l’exercice 2020. Si la commission a le monopole de l’initiative en ce domaine, il faudra que le conseil des chefs d’Etat s’en saisisse. C’est prévu à l’ordre du jour du sommet du 28 mars qui réunira les chefs d’Etat et de gouvernement.
Une fois le principe retenu, les discussions risquent d’être tendues, tant les intérêts sont divergents dans ce domaine, entre les pays hostiles par principe à toutes taxes européennes et qui verront d’un mauvais œil ce projet ou ceux qui ont su attirer le siège européen de certains géants du numérique, comme l’Irlande avec Facebook.
Une taxe intermédiaire
Toutefois, il ne s’agirait que d’une taxe intermédiaire en attendant que le projet de la Commission de créer une taxe pérenne reposant sur des règles renouvelées du domicile fiscal via la notion d’établissement permanent soit adoptée par les différents gouvernements. Grâce à ce cadre innovant, les entreprises pourraient être taxées, y compris sur le territoire d’un Etat où elles ne sont pas physiquement présentes mais où elles réalisent malgré tout un chiffre d’affaires.
Mais, là encore, il faudra un accord de tous les pays membres. Cette annonce intervient tandis que l’OCDE travaille aussi à l’élaboration d’un accord international sur ces questions. Certains pays de l’UE voudraient que cet accord international soit premier, quand d’autres poussent pour que l’UE ait un rôle moteur afin d'entraîner les pays membres de l’OCDE. Autant dire que ce n’est pas demain qu’on risque de parler de matraquage fiscal européen au board de quelques firmes globales du numérique.
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