La loi pour une République numérique part en miettes

La loi pour une République numérique est prête pour être débattue par le Parlement à partir du 19 janvier 2016.

Censée préparer la France aux enjeux numériques du XXIe siècle, elle ne traite finalement que de quelques volets (ouvertures des données publiques, protection des données personnelles, accès aux réseaux…) et encore que partiellement.

La plupart des sujets étant réglés par ailleurs, soit via d’autres lois, soit au niveau européen.

Mais elle a le mérite de poser quelques principes qui pourraient inspirer l’Europe : données d’intérêt général, mort numérique, droit à l’oubli et portabilité des données personnelles. Enfin, s'ils résistent aux débats parlementaires.

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La loi pour une République numérique part en miettes

Le 9 décembre, Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat chargée du numérique, a enfin pu présenter son projet de Loi pour une république numérique, en chantier depuis près de trois ans, en Conseil des ministres. Presqu’un exploit. Car son élaboration, innovante et participative, a pour le moins été semé d’embuches.

Une loi en miettes

Et le calvaire n’est peut-être pas fini. Car petit à petit le projet de loi s’est vu dépouillé de ce qui en aurait fait un texte réellement fondateur. Le principe d’open data et de gratuité des données publique a dû être sorti du projet au profit d’une loi Walter, présentée en urgence, pour respecter les délais de transcription d’une directive européenne. Ceel-ci ne laisse à la Loi d’Axelle Lemaire que l’ouverture par défaut des données publiques, en en faisant une nouvelle mission de l’Etat dans Article 7, le seul réellement original sur les 48 articles que comportent désormais le projet - contre 30 dans la version soumise à consultation publique.

Les lois et codes que modifie la loi numérique

Sur les 48 articles que comportent désormais le seul l’article , 47 modifient des lois ou codes existants :

  • le code des relations entre le public et l’administration (1978),
  • la loi relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques (1993),
  • le code général des collectivités territoriales,
  • la loi sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques (1951),
  • la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (1978),
  • le code de la recherche,
  • le code des postes et des communications électroniques,
  • le code de la consommation,
  • le  code monétaire et financier,
  • le code de la sécurité intérieure (à venir pour donner un statut aux e-joueurs),
  • la loi pour l’égalité des droits (2005),
  • le code de l’action sociale et des familles.

 

On passe également sur le volet économique que devait aborder la loi et qui sera finalement traité dans la Loi Noé (nouvelles opportunité économique) d’Emmanuel Macron, dans les lois de finance, notamment concernant la fiscalité de l’économie du partage ou au niveau européen.

Bien rester parallèle à l'Europe

"Le but de cette loi est de s’articuler avec les règlements européens, par d’y être orthogonal. Par exemple, sur les données personnelles, la loi ajoute la notion de mort numérique que l’Europe ne traite pas", explique un conseiller d’Axelle Lemaire. Mais le projet ne traite pas le sujet de l’âge de la majorité numérique, que l’Europe vient pourtant de décider de laisser à la discrétion des Etats. De même le projet de loi ne peut pas traiter de la régulation des plates-formes, qui doit être traité par Bruxelles, se limitant au volet de l’information des consommateurs, en donnant notamment de nouveaux pouvoirs à la Cnil.

De la construction d'une économie de la donnée, le projet de secrétaire d’Etat chargée du numérique n’a réussi à garder que la notion de données d’intérêt général, et encore n’est-il pas sûr qu’elle résistera aux lectures des parlementaires, le texte devant être débattu au parlement. C’est le député socialiste de Maine-et-Loire, Luc Belot, qui a été nommé rapporteur par la Commission des lois de l’Assemblée nationale.

Une transparence exemplaire

Suite à la consultation publique, 90 modifications et 5 articles ont été ajoutés au projet initial. Ces derniers concernent l’ouverture des algorithmes publics qui ont servi à l’élaboration d‘une décision pour un particulier, la reconnaissance de l’e-sport, le droit à l’auto-hébergement de son propre service d’email, l’exercice en ligne de ses droits Cnil sur ses données personnelles dès lors qu'elles sont collectées par un sites web et l’obligation d’information sur la durée de conservation des données.

A la demande du président de la République de voir figurer dans cette loi le volet du très haut débit, une mesure technique, qui permet aux syndicats mixtes de communes de se regrouper, a été rajoutée au projet. En revanche, la notion de domaine publique informationnel n’a pas résisté à la polémique sur le droit d’auteur. Mais l’idée n’est pas abandonnée : une mission doit être constituée.

L'impossible Code numérique

Selon les conseillers d’Axelle Lemaire, l’examen du texte par le conseil d’Etat, à partir du 6 novembre, ne l’aurait que peu modifié. Mais lorsque l’on consulte le document amendé mis en ligne sur le site de la consultation publique, dans un souci de transparence sur la fabrique de cette loi atypique, on constate l’étendue des modifications apportées. Le conseil d’Etat se serait d’ailleurs interrogé sur l’opportunité de créer un code du numérique, au lieu de modifier tous les codes et loi existant. L’option n’a clairement pas été retenue... pourtant cela aurait fait sens et donner plus de poids à cette loi.

Et le texte n’est pas au bout de ses peines. Audité par la Commission des affaires européennes mi décembre, il passera aussi par les commissions des affaires sociales, économiques et culturelle le 12 janvier 2016 et devant la Commission des lois le 16 janvier avant le débat à l’Assemblée, en procédure accélérée (qui permet éventuellement de supprimer la deuxième lecture) à partir du 19 janvier.

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