
"Avant Internet, la donnée protégeait les acteurs de l'assurance contre de potentiels nouveaux entrants. Impossible de construire une offre valable et bien tarifée sans avoir un historique de data et une base client importante", se souvient Pascal Demurger, directeur général de la Maif et président du Groupement des entreprises mutuelles d'assurance, au Congrès de l'assurance digitale organisé le 3 novembre par nos confrères de L'Argus de l'assurance.
Mais pour le dirigeant, cet ancien garde-fou s'est transformé en cheval de Troie. Les Gafa, Google en tête, disposent de très nombreuses données sur leurs utilisateurs et sont capables d'uberiser le secteur. "S'ils décident de se lancer dans l'assurance, ils pourront construire des offres très personnalisées, aux tarifs plus segmentés que les nôtres, adaptées aux besoins des internautes qu'ils connaissent bien, avertit Pascal Demurger. Ils ne serviront que les clients rentables, laissant les autres aux assureurs traditionnels."
La donnée, un frein pour les insurtech
Mais les data restent un frein pour les insurtech (start-up de l'assurance), qui peinent à construire leurs offres, faute d'un historique et d'une base client suffisante. InsPeer, fondée en février 2014 et basée à Paris, a développé une plate-forme mutualiste. Elle permet à ses utilisateurs de partager avec une communauté restreinte (entre une dizaine et une centaine de personnes) les risques de paiement de franchise (ce qui reste à la charge de l'assuré en cas de dommage). L'offre concerne pour l'instant les franchises des assurances auto, moto et habitation.
S'il a un accident de voiture, un utilisateur d'InsPeer ne payera pas ses 300 euros de franchise. Les 100 membres de sa communauté verseront 3 euros chacun pour payer son assureur. En échange, il déboursera 3 euros à chaque fois qu'un autre membre a un accident. Cela permet de lisser les coûts.
Des partenariats start-up / assureurs
"Nous avons du mal à proposer une offre lisible à nos clients, car nous ne disposons pas d'une base de données suffisante", explique Louis de Broglie, cofondateur de la jeune pousse. Difficile pour InsPeer de dire à ses utilisateurs combien de fois ils vont devoir verser 3 euros chaque année. Pour se développer, l'entreprise ne mise donc pas sur le BtoC. Elle développe des partenariats avec des assureurs, qui mettent à sa disposition leur base de données. "Nous avons vu tous les acteurs du marché, ils sont intéressés par notre modèle", assure Louis de Broglie.
Les données des assureurs leurs permettent donc de tisser des liens avec des start-up innovantes. Ils peuvent ainsi faire évoluer leur modèle... et in fine résister aux futures attaques des Gafa ?
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