
Le crédit inter-entreprises devrait prochainement être autorisé en France : les députés ont adopté le 9 février au soir un amendement à la loi Macron qui autorise les sociétés non-bancaires à se prêter mutuellement de l'argent. Mais les acteurs privés qui manquent de liquidités pour réaliser des investissements ont d'autres solutions à portée de main : ils peuvent notamment utiliser le troc, également appelé "échange inter-entreprises".
Ce modèle a été validé par le ministère français des Finances. Pour fluidifier ces échanges directs de biens et de services, la société France Barter, créée en septembre 2014, a développé une plate-forme numérique. Tous les membres du réseau y disposent d'un compte en barter (une unité de compte qui permet de faciliter les transactions).
1 barter = 1 euro
France Barter se rémunère en prélevant un pourcentage sur les transactions
Pour se rémunérer, France Barter prélève 5% du montant des transactions effectuées sur le site. Chaque membre du réseau paye en plus un droit d'accès annuel de 235 euros. L'entreprise, qui compte aujourd'hui 6 salariés, finance pour l'instant son développement sur fonds propres, elle n'a pas encore fait appel à des investisseurs extérieurs.
Si une agence de communication a besoin d'acheter 10 000 euros de meubles mais qu'elle ne dispose pas des financements nécessaires, elle peut trouver un fournisseur via France Barter. Pas besoin de payer avec des euros : son compte sur le site Internet est tout simplement débité de 10 000 barters (1 barter = 1 euro) et celui du fournisseur crédité de ce montant. En échange, pour rééquilibrer la balance, la société marketing pourra par exemple vendre à une troisième entreprise membre du réseau le développement d'un site Internet à 10 000 barters. Quant au fournisseur, il pourra acheter à une quatrième compagnie des biens ou des services...
"Notre plate-forme permet aux entreprises de troquer sans que leurs besoins ne soient forcément simultanés. Nos algorithmes, notamment basés sur la géolocalisation, permettent aux offres de rencontrer une demande correspondante", explique Arthur Bard, co-fondateur et PDG de la société basée à Paris et à Lyon. Les entreprises ne se contentent pas d'échanger des biens et des services : "L'un des membres de notre réseau, le fablab Tri Rhône-Alpes, va proposer des heures d'utilisation de ses nouvelles machines (imprimantes 3D et appareils de découpe laser) à d'autres sociétés qui pourraient en avoir besoin. Les utilisateurs de notre site peuvent inventer des usages du barter en fonction de leur secteur d'activité."
des entreprises triées sur le volet
Depuis septembre 2014, 250 entreprises se sont inscrites sur la plate-forme, qui vise les 1 000 membres d'ici à la fin de l'année 2015. Mais la cible est beaucoup plus vaste : "1,2 million de PME pourraient à terme être intéressées par ce projet pour pallier à leur manque de trésorerie", souligne Arthur Bard. Des sociétés basées dans l'Hexagone pour le moment, mais France Barter compte étendre son offre aux pays de la zone euro d'ici deux ans. Les prévisions de France Barter ont des chances de se matérialiser : "aux Etats-Unis, ce système de plate-forme d'échange avec des comptes en barter existe depuis les années 90, il s'est beaucoup développé avec le boom internet. Aujourd'hui, il existe plus de 300 opérateurs américains sur ce marché", indique cet ancien de chez Airbus.
Pour entrer dans le réseau, les entreprises sont triées sur le volet. "Nous examinons leur solidité financière avec nos deux partenaires, le Crédit Coopératif et Ellisphère, qui nous fournit des informations financières sur ces sociétés. Seuls les acteurs privés en bonne santé peuvent participer aux échanges. Plus ils sont solides et plus ils proposent des biens et services pour lesquels il y a une forte demande, plus ils ont le droit d'avoir un découvert important sur leur compte en Barter", détaille le PDG. Les membres du réseau gardent ainsi confiance dans cette unité de compte et multiplient les échanges.
Lélia de Matharel
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