Les 3 conséquences du retrait de STMicroelectronics de l’alliance R&D d’IBM

Le fabricant franco-italien de semi-conducteurs STMicroelectronics a annoncé son intention de quitter l’alliance R&D d’IBM. Une décision qui pourrait avoir trois impacts importants sur l’avenir de l’entreprise.

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Les 3 conséquences du retrait de STMicroelectronics de l’alliance R&D d’IBM

L’information est presque passée inaperçue. STMicroelectronics va se retirer de l’alliance R&D d’IBM. Jean-Marc Chery, directeur général du groupe, en charge des circuits numériques, de la recherche et de la technologie, l’a confirmé lors de la présentation des résultats financiers de 2014, le 28 janvier 2015. Une décision lourde de conséquences pour l’avenir technologique et industriel de l’entreprise.

L’alliance de développement technologique regroupe autour d’IBM, près de New York (États-Unis), presque tous les grands industriels de la microélectronique mondiale, à l’exception d’Intel, numéro un du secteur, et de TSMC, plus grand fondeur de silicium au monde. Son objectif est d’assurer à ses membres la parité technologique avec Intel en mutualisant les efforts de recherche visant à poursuivre la miniaturisation électronique, et donc la loi de Moore. STMicroelectronics en est membre depuis 2007.

Jean-Marc Chery justifie la décision de s’en retirer par le désengagement d’IBM de la microélectronique (à l’exception de la recherche fondamentale et du développement de ses processeurs Power), pour laisser le terrain libre à GlobalFoundries. Quels vont en être les impacts sur le fabricant franco-italien de semi-conducteurs ? La direction se refuse à tout commentaire. Mais trois conséquences se dessinent.

Impact 1 : des économies financières

En difficultés depuis trois ans à cause de sa mésaventure dans les circuits pour mobiles, STMicroelectronics est engagé dans un plan drastique d’économie. Objectif : ramener les coûts d’exploitations entre 550 et 600 millions de dollars par trimestre d’ici fin 2015, au lieu d’environ 900 millions de dollars il y a 2 ans. L'entreprise est proche du but puisque le chiffre est tombé à 611 millions de dollars au quatrième trimestre 2014. Mais elle doit dégager cette année une économie supplémetaire de 100 millions de dollars dans les circuits numériques avancés, une activité en baisse de 43% en 2014.

L’accord de transfert d’activité microélectronique conclu entre IBM et GlobalFoundries ne serait alors qu’un prétexte pour STMicroelectronics de réaliser cet objectif financier. "Pour participer à l’alliance R&D d’IBM, il faut soit apporter de la technologie, soit payer, explique Jean-Pierre Della Mussia, ancien directeur de la rédaction d’Electronique Hebdo, aujourd’hui consultant. Or STMicroelectronics n’a rien à amener sur le plan technologique. Pour accéder aux résultats de l’alliance, il doit donc payer."

Le montant des redevances payées à IBM reste confidentiel. Il pourrait se monter à quelques dizaines de millions de dollars par an.

Impact 2 : une perte de capacité R&D

Carlo Bozotti, Président et CEO de STMicroelectronics, justifiait l’adhésion de son groupe à l’alliance d’IBM par la recherche de gains d’échelle et d’efficacité en matière de R&D. "Cela représente un gain de 1 à 2% du chiffre d’affaires que nous injectons dans l’innovation pour sortir nos produits plus vite", expliquait-il. Le groupe devra donc accroître son effort de R&D de 1 à 2% du chiffre d’affaires pour garder la même capacité d’innovation après son retrait de l’alliance d’IBM.

Impossible dans le contexte d’économie actuel. Depuis le pic de 2011, le groupe a perdu près de 24% de son chiffre d’affaires. En cause, le rétrécissement de ses activités dans les circuits numériques avancés, comme ceux destinés aux mobiles. Conséquence : le besoin de R&D dans ce domaine se réduit aussi. Le retrait de l’alliance d’IBM, qui se focalise sur les circuits numériques, suit cette baisse.

Impact 3 : davantage de sous-traitance de la production

L’un des volets important de l’alliance d’IBM est le développement des procédés technologiques pour la fabrication des prochaines générations de puces en 20 nm (nanomètres), 14 nm et 10 nm. Or "cela fait belle lurette que STMicroelectronics s’arrête à la génération de 28 nm, constate Jean-Pierre Della Mussia. Son retrait signifie qu’il n’est plus intéressé par la migration de ses procédés de fabrication vers une gravure plus fine et qu’il compte s’appuyer exclusivement sur des fondeurs extérieurs comme Samsung pour fabriquer ses prochaines générations de circuits avancés." Aujourd’hui, STMicroelectronics fabrique ses circuits en 28 nm en partie dans son usine à Crolles, près de Grenoble, et le reste chez Samsung, TSMC, GlobalFoundres et UMC.

Cette décision serait logique avec le recentrage d’IBM sur la recherche fondamentale (matériaux, structure de transistor...). La production n’est plus l’affaire de Big Blue, mais de son fondeur GlobalFoundries. STMicroelectronics suivrait la tendance.

"Nous continuerons à collaborer avec IBM et d’autres", affirme néanmoins Jean-Marc Chery. Comme c’est le cas dans Nano 2017, programme de R&D soutenu par les pouvoirs publics français et qui se déroule sur le site de STMicroelectronics à Crolles. À moins que Big Blue n'en fasse partie que pour soutirer sa part des subventions publiques.

Ridha Loukil

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