Les relations start-up/grands groupes, plus matures, mais…

Le Village by CA Paris a dévoilé ce 25 avril 2019, et pour la première fois avec Capgemini, son 3e baromètre annuel de la relation startup/grand groupe. Comment ces relations évoluent-elles ? Quels sont les points à améliorer ? Y a-t-il encore des points de friction ? Résultats.

 

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Les relations start-up/grands groupes, plus matures, mais…

Les partenariats entre grands groupes et start-up, tout le monde en parle. Mais au-delà de l’effet communication, qu’en est-il vraiment de la relation entre les mastodontes et les jeunes pousses ? Pour le mesurer, le Village by Ca a lancé en 2017 un baromètre dédié. Les résultats de la 3e édition*, dévoilés ce 25 avril 2019, et pour la première fois avec Capgemini, permettent d’évaluer l’évolution de ces rapports.

Pour estimer la qualité de relation entre une start-up et un grand groupe, quatre critères ont été identifiés : rapidité, simplicité, bienveillance et création de valeur


Des délais encore trop longs

Sur la rapidité, qui s’entend en termes de délais de prise de décision, délais d’exécution et délais de paiement, "on voit un tournant en termes d’exigence de la part des start-up", constate Seddik Jamai, en charge du Digital Financial Services & FinTech au sein de l’entité Services Financiers chez Capgemini Invent. En effet, le baromètre 2019 révèle une hausse de l’insatisfaction et de l’exigence des start-up.


Dans le détail, 84% des start-up interrogées trouvent que le délai entre la prise de contact et la prise de décision est lent ou très lent, soit 18% de plus qu’en 2018. Un décalage avec la perception des grands groupes qui ne sont que 60% à le penser, soit 10% de moins que l’année précédente… Les délais d’exécution sont également toujours jugés lents ou trop lents par 77% des start-up., Alors qu’à l’inverse, seulement 43% des grands groupes le pensent, contre 70% l’année dernière…


Autre décalage de perception, la question des délais de paiement. Ceux-ci sont estimés lents ou très lents par 80% des start-up (contre 64% en 2018), contre seulement 45% dans les grands groupes (versus 64% en 2018).


Une question de vie ou de mort

Or, selon Seddik Jamai, "le délai entre la prise de décision et le premier contact, et le moment du paiement sont structurants pour les start-up et encore plus pour les jeunes start-up. (…) Le décalage est une question de vie ou de mort pour la start-up, voire de rachat". Et bien que les grands groupes se perçoivent eux plus performants, l’enjeu est aussi important pour ces deriniers d’un point de vue opérationnel, estime-t-il, notamment celui d’avoir l’organisation adaptée pour agir rapidement… et éviter de se faire "disrupter".


A ce sujet, Jade Francine, co-fondatrice de la start-up WeMaintain, qui vient de lever 7 millions d’euros, s’étonne de ces délais : "En Chine et aux Etats-Unis, ça va beaucoup plus vite". Et d’ajouter : "L’autre point, c’est de limiter le nombre de RDV. Quand on est une start-up, on a parfois l’impression qu’on va divertir – c’est l’après-midi innovation – mais c’est bien du business. Je ne suis pas là pour divertir les équipes opérationnelles !" Si Fabrice Marsella, Directeur du Village by CA Paris, la rejoint, il tempère cependant, en exprimant le fait que les rencontres avec les start-up "font partie de l’acculturation et de cette conduite du changement".

Des relations plus simples, mais…

Autre critère de qualité de la relation entre grands groupes et start-up : la simplicité dans la relation. Autrement dit : est-ce que les objectifs de collaboration sont clairs, et est-ce que la communication est fluide ? Résultat : les objectifs sont clairs pour 69% des start-up et 88% des grands groupes. La communication est elle aussi perçue comme facile pour 64% des start-up, et 84% des grands groupes. Des taux de réponses très proches de 2018. Même si on note toujours un écart de perception entre les deux populations…


Pour Atef Fathallah, Head of Digital Innovation chez Christian Louboutin, les objectifs sont clairs dès le départ : "On commence à bien maitriser le cycle d’innovation. On a dépassé les stades du POC. On commence par regarder la fin du cycle, ce qui induit des contraintes et des exigences. On demande aux start-up des choses en amont et de manière prématurée. On pense directement à la phase d’industrialisation. On a envie d’aller vite et on impose des contraintes." Et Fabrice Marsella d’abonder : "Il y a 4-5 ans, on faisait des POCs pour faire des POCs. Aujourd’hui, cela s’inscrit davantage comme une étape à l’industrialisation". Une notion qui simplifie de fait les relations, claires dès le départ.

… des lourdeurs contractuelles augmentent

Un bémol toutefois : la simplicité contractuelle s’est dégradée. Et ce, alors même que certains grands groupes se sont mis en ordre de marche. "On est très exigeant par rapport à certaines clauses contractuelles. On a tendance à imposer des choses contraignantes à des start-up qui sont en face. Mais, notre NDA, on l’a synthétisé pour qu’il fasse 2 pages", témoigne Atef Fathallah.


"Ce qui m’interpelle, c’est que davantage de start-up viennent avec leurs avocats. Elles ont mûri, ce qui entretient cette complexité, qui rallonge nécessairement les délais", constate Fabrice Marsella. Une bonne chose car les start-up prennent conscience de la nécessité de se protéger d’un point de vue juridique… "Quand le grand groupe choisit de nous prendre car on est une start-up, il faut aussi qu’il s’adapte à nos contraintes", martèle Jade Francine.


Mais cela génère un effet pervers… "Désormais, on se parle entre avocats, ce qui amène son lot de complexité", poursuit Fabrice Marsella. Résultat : 47% des grands groupes et 46% des start-up estiment que les conditions contractuelles sont non adaptées…

Bienveillance, vraiment ?

En termes de bienveillance, autre point clé de l’équilibre de la relation, la perception est différente de la part des start-up et des grands groupes. Si ces derniers sont très positifs à 73%, seulement 46% des start-up estiment que la relation est équilibrée. Et ce bien que tous les acteurs qui entourent la relation sont en train de se transformer aujourd’hui. "Chez Christian Louboutin, on a essayé de se mettre à la place de ses start-up, de comprendre leur contraintes. Nous avons lancé une entité qui a le mode de fonctionnement d’une start-up, le Loubi Lab, qui va jouer un peu le rôle d’une digital factory, et faire le lien avec nos directions", se justifie Atef Fathallah. Mais ce n’est pas suffisant pour les start-up : "Elles se sentent un peu seules", observe Fabrice Marsella.


Alors pour rééquilibrer les relations, Jade Francine insiste : "Il ne faut pas avoir peur de dire les choses et le dire à très haut niveau pour sensibiliser, même si parfois, c’est contre-intuitif"

Le CA avant tout, pour les start-up

Car pour les start-up, l’intention est claire ! Nouer des relations avec un grand groupe est avant tout un levier business : "Quand on est une start-up, ce qui arrive en tête de liste, c’est le besoin du chiffre d’affaires (à 73 % , ndlr) ", constate Fabrice Marsella. Et ce, pour vivre, mais aussi pour rassurer les investisseurs, et même lever des fonds. L’autre objectif est d’avoir des références, à 63%. "C’est beau d’avoir une start-up qui fait le plus beau produit au monde, mais il faut avoir des clients qui vous font confiance", ajoute Fabrice Marsella.


Toujours d’après cette étude, les grands groupes, eux, cherchent autre chose. L’objectif est davantage d’améliorer l’expérience utilisateur, à 73%, et de redorer leur image (à 55%). Pour eux, travailler avec les start-up est un moyen de montrer leur ouverture et de travailler leur marque employeur.


Conclusion ? "Après une tendance forte d'amélioration de la relation entre start-up et grands groupes en 2017 et 2018, les start-up expriment une plus grande impatience à accélérer la concrétisation et l’industrialisation de leur projets. Mais ce que nous trouvons particulièrement remarquable c’est que l’envie est toujours là : start-up et grands groupes restent convaincus de l’intérêt de la collaboration. Il reste à renforcer les conditions nécessaires et suffisantes à leur réussite, qui ne sont pas encore toutes atteintes", précise Fabrice Marsella.

Méthodologie :
En 2019, 159 personnes ont répondu à l’étude : 61 représentants de grands groupes et 98 représentants de start-up. Le questionnaire a été administré à la fois auprès des startups et des grandes organisations des réseaux respectifs de Capgemini, du Village by CA, de Syntec Numérique et plus largement aux acteurs clés de l’écosystème français.

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