"Reviens Léon", l'opération anti French bashing des entrepreneurs français
Dix start-up françaises à forte croissance s'unissent autour du programme "Reviens Léon", qui vise à faciliter le retour en France de talents expatriés.
Sylvain Arnulf
Mis à jour
28 mai 2015
La tribune "Barrez-vous" publiée en 2012 ; le mouvement des "Pigeons" lancé la même année, suivi par celui des "Poussins" : ces dernières années les entrepreneurs et jeunes talents français se sont plutôt engagés dans des mobilisations défensives, contre la perte de compétitivité du pays, contre l'absence de perspectives d'avenir pour la jeunesse, contre la politique fiscale....
Ils ont nourri, parfois sans s'en rendre compte, le French Bashing ambiant. Puis une dynamique inverse s'est peu à peu installée, symbolisée par la création du réseau French Tech, la visite de François Hollande dans la Silicon Valley (avec un "hug" symbolique au chef de file des Pigeons) et le développement d'événements de promotion de l'écosystème français à l'étranger comme la French Touch Conference.
"reviens léon"... 30 ans après
L'ambiance a changé à tel point que dix start-up phares s'engagent aujourd'hui dans un programme inédit (d'initiative privée, mais soutenu par la French Tech) malicieusement baptisé "Reviens Léon". Pour les moins jeunes, ce slogan est une référence à une publicité culte pour les raviolis Panzani, de 1985.
Ce "Reviens Léon" version 2015 est un signal envoyé par dix start-up françaises à forte croissance (dont Blablacar, Sigfox, Drivy, showroomprivé.com, La Fourchette) aux français expatriés. En particulier aux 40 000 talents français qui travaillent dans la Silicon Valley. "On veut leur dire, avec un angle de communication original, que l'écosystème de start-up françaises a complètement changé ces dernières années, explique Frédéric Mazzella, fondateur et président de Blablacar. Il y a aujourd'hui de superbes boites en pleine expansion internationale. Elles ont besoin des meilleures pour réussir, et les Français font justement partie des meilleurs." Or, les "scale-up" ont toutes les difficultés du monde à attirer des profils de haut niveau, ayant une expérience internationale.
Un "Welcome back" pack
Ce n'est pas seulement la fiscalité française qui rebute les candidats au retour, c'est aussi l'aspect organisationnel qu'implique un changement de vie radical. "Reviens Léon" va donc accompagner les candidats au retour de façon très concrète : des experts fiscaux les conseilleront (car le retour est un vrai casse-tête de ce point de vue), la recherche de logement sera facilitée, tout comme les démarches administratives... et Michel et Augustin fourniront les "Léon" en yaourts, gateaux et autres jus de fruits pendant trois mois.
Les dix start-up ont également décidé de mutualiser leurs processus de recrutement pour davantage d'efficacité. A travers le programme Reviens Léon, elles partageront notamment un logiciel de tri des profils, Smart Recruiter. Leurs offres d'emplois seront publiées sur le site créé pour l'occasion, d'ores et déjà en ligne. Les premiers Léon rapatriés devraient arriver à l'automne.
Un road-show international
Pour faire connaître l'initiative "Reviens Léon" auprès du public cible, trois conférences seront organisées d'ici l'été. Un panel "Reviens Léon" sera organisé lors de la "French Touch Conference", le 24 juin à New-York. Une réunion du même type aura lieu deux jours plus tard à San Francisco, puis début juillet à Londres.
faciliter la circulation des talents
Ce dispositif (privé), avec un budget de départ de quelques centaines de milliers d'euros, est complémentaire de l'initiative (publique) annoncée il y a quelques jours : le "French tech Ticket", qui vise à attirer les talents étrangers en France. L'idée est de faire circuler les talents et les idées, une philosophie qui colle parfaitement au monde numérique.
"On est pour la circulation des compétences, on n'est pas là pour dire : il ne faut pas partir de France", précise Frédéric Mazzella. "Il ne s'agit pas d'être trop cocorico et de se regarder le nombril : notre message, c'est 'reviens', mais tu peux aussi rester où tu es et apporter tes compétences ; rejoindre les aventures françaises du numérique de là où tu es", ajoute Marion Moreau de Sigfox.
Axelle Lemaire, la secrétaire d'Etat du Numérique, tout en démentant toute tentative de récupération de l'initiative, juge qu'elle s'intègre parfaitement à la politique d'attractivité menée par le gouvernement. "On promeut à la fois un pays ouvert et tolérant, mais aussi une forme de fierté nationale", résume-t-elle.
La secrétaire d'Etat juge que la circulation des talents est indispensable pour réussir la transformation digitale de l'économie et de la société : "La transformation des entreprises, c'est adopter les outils numériques, mais c'est aussi un défi de ressources humaines. Ce qui fait la force du pays, son attractivité économique, c'est d'abord sa capacité à attirer les meilleurs talents."
Sylvain Arnulf
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