Les dirigeants des entreprises chinoises n‘ont décidément pas froid aux yeux. Ils se lancent à l’assaut de l’un des grands fleurons américains des semi-conducteurs:
Micron Technology. Le raid est lancé par Tsinghua Unigroup pour un montant de 23 milliards de dollars, ce qui serait la plus importante acquisition de la
Chine dans le secteur. L’offre de rachat, faite en catimini le 14 juillet 2015, a été depuis confirmée par le cabinet taïwanais TrendForce.
Opération audacieuse
Il s’agirait de la troisième acquisition chinoise majeure de l’année dans les semi-conducteurs après celles des sociétés américaines fabless ISSI et OmniVision par des fonds d’investissement chinois. Ce serait aussi la plus audacieuse puisqu’elle vise le seul fabricant américain de puces mémoires Dram et Flash.
Par cette opération, la Chine affiche sa détermination à se doter d’une industrie de puces mémoires indispensable à son indépendance technologique en électronique. Le rachat d’ISSI, un fournisseur de mémoires embarquées et microcontrôleurs, constitue un premier pas dans cet objectif. Avec sa montée en puissance dans les mobiles, la télévision ou encore les PC, l’Empire du milieu devient de plus en plus vorace en mémoires. Selon Summit Research, il devrait consommer pour 13 milliards de dollars de mémoires Dram en 2015 et sa consommation pourrait monter à 20 milliards de dollars en 2020. Or, il ne dispose d’aucun acteur local dans ce domaine.
Obstables réglementaires
Les analystes demeurent toutefois sceptiques sur l’aboutissement de cette opération. Davantage pour des raisons réglementaires que financières. Tsinghua Unigroup, qui détient les sociétés fabless Spreadtrum et RDA Microelectronics, peut compter sur le soutien financier du gouvernement chinois pour relever son offre et satisfaire les exigences des actionnaires de Micron Technology. Il peut également demander au géant américain
Intel, qui détient 20% de son capital, d’intercéder en sa faveur auprès des autorités outre-Atlantique.
Mais l’affaire s’annonce délicate. Les
Etats-Unis considèrent les semi-conducteurs comme un secteur hautement stratégique pour leur sécurité nationale. On voit mal le gouvernement américain laisser filer un fleuron comme Micron Technology en Chine, alors que les tensions sont au plus haut entre les deux puissances sur le terrain de la sécurité. Un contexte qui pourrait amener Intel à se porter acquéreur de Micron Technology dans sa stratégie de compléter son offre de puces électroniques pour les équipements de data centers. Le groupe chinois pourrait, de son coté, se rabattre sur SanDisk, partenaire américain de
Toshiba dans les mémoires Flash. Mais là aussi, il serait confronté à l'obstacle règlementaire.