Amazon, Google et Microsoft compensent leurs émissions liées à l'IA générative à coups de crédits carbone

L'explosion de l'IA générative avec les grands modèles de langage nécessite des capacités de calcul sans précédent, pour le plus grand bonheur de Nvidia. Le revers de la médaille est moins glorieux. Le coût environnemental élevé de ces modèles impacte les objectifs de neutralité carbone que se sont fixés la majorité des géants technologiques, à commencer par Amazon, Google et Microsoft. Pour profiter de cette vague d'innovation sans revenir sur leurs objectifs, ces derniers préfèrent acheter des millions de crédits de compensation carbone.

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Amazon, Google et Microsoft compensent leurs émissions liées à l'IA générative à coups de crédits carbone
Nombre d'entreprises, à l'instar de Microsoft, achètent des millions de crédits d'élimination du carbone qui serviront (en théorie) à restaurer les terres déboisées en Amazonie.

L'IA générative gagne du terrain tant en entreprise qu'auprès du grand public, pleine de promesses qui tiennent de la solution miracle : amélioration de tout, automatisation et personnalisation à tout bout de champ, créativité décuplée et sans effort, réduction des coûts par un facteur 10… La liste est longue. A contrario, celle de ses inconvénients est rarement mise en avant, à commencer par son coût énergétique.

L'IA générative, un monstre technologique trop gourmand en énergie

La génération à grande échelle de texte ou d'images par ces énormes modèles demande d'énormes infrastructures informatiques. Dans une étude récente, deux chercheurs de Hugging Face et une chercheuse de l'université Carnegie Mellon démontrent que générer une image au moyen d'un modèle d'IA générative consommerait autant d’énergie que la recharge complète d’un smartphone de milieu de gamme.

De même, produire 1000 images avec un modèle puissant comme Stable Diffusion XL émettrait autant de CO² que parcourir 6,5 km en voiture. Par ailleurs, entraîner des modèles plus performants (et donc plus grands) et répondre à la demande en matière d'inférence nécessite de créer d'immenses data centers.

Alors, comment faire pour combiner ces coûts avec les vœux pieux des géants technologiques en matière de responsabilité environnementale ? Sans surprise, cela passe par l'achat de crédits carbone. On apprend notamment par le biais de Reuters que Microsoft va acheter 8 millions de crédits de compensation carbone à BTG Pactual, ce qui représente la plus grande vente de crédits carbone jamais réalisée jusqu'ici. C'est la branche forestière de la banque d'investissement brésilienne BTG Pactual qui a accepté de vendre ces crédits au géant de Redmond.

Microsoft pollue autant que Haïti ou Brunei

Pour Microsoft, ces crédits achetés serviront à financer des projets de restauration forestière en Amérique latine. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que la firme opère un tel tour de passe-passe. En décembre dernier, elle annonçait acheter jusqu'à 1,5 million de crédits d'élimination du carbone qui serviront à restaurer les terres déboisées en Amazonie. Ces crédits ont été achetés auprès de la start-up brésilienne Mombak Gestora de Recursos, qui promet en retour de planter "plus de 100 espèces d'arbres indigènes pour revitaliser les écosystèmes et permettre l'élimination naturelle du carbone". Un autre moyen de se rapprocher de son objectif de neutralité carbone d'ici 2030.

Dans un précédent article sur le sujet, nous expliquions que les projets des géants technologiques pour devenir neutre en émissions carbone étaient largement mis à mal par l'explosion de la demande en solutions d'IA générative. Ainsi, rien qu'au cours de son dernier exercice financier, Microsoft a émis 15 357 millions de tonnes de CO², un chiffre comparable à la pollution carbone annuelle d'Haïti ou du Brunei.

Amazon, un gros pollueur à la conscience tranquille

De son côté, Amazon, leader incontesté du cloud, a fait le choix de s'engager auprès de la coalition LEAF – coordonnée par Emergent, une organisation à but non lucratif dédiée à mettre fin à la déforestation tropicale – à coups de milliards de dollars pour se racheter une conscience. Toutefois, un rapport publié en 2022 par le NewClimate Institute a révélé que de nombreuses entreprises participant à cette coalition, dont Amazon, Nestlé et Unilever, exagèrent déjà leurs engagements en matière de climat en se fixant des objectifs "net zéro" trompeurs qui reposent sur des compensations carbone plutôt que sur de véritables réductions d'émissions.

Pour compenser ses émissions, le géant avait également choisi en septembre dernier d'acheter pas moins de 250 000 tonnes de crédits d'élimination du CO² sur 10 ans auprès de l'une des plus grandes sociétés mondiales de capture directe de l'air, 1PointFive, une filiale d'Oxy.

Google, étourdi par la folle taille de ses modèles

Google, pour sa part, prévoit "de conclure des contrats pour au moins 35 millions de dollars de crédits carbone au cours des 12 prochains mois". Hasard du calendrier ou pas, l'annonce a été faite en mars dernier à quelques semaines d'intervalle de la sortie de Gemma, la famille de modèles d'IA générative ouverts et basés sur Gemini. Des modèles qui pèsent plutôt lourd puisqu'ils sont disponibles dans deux tailles : 2 et 7 milliards de paramètres.

Or, il existe une relation directe entre la taille d'un modèle d'IA et la quantité d'émissions produites lors de son utilisation. Les grands modèles généralistes sont beaucoup plus énergivores que les modèles spécialisés pour une tâche précise. La firme de Mountain View ne semble toutefois pas s'en préoccuper : fin mai, elle a dévoilé une version à 27 milliards de paramètres qui vient rejoindre la famille de LLM Gemma.

Si les performances sont au rendez-vous, le coût énergétique qu'implique l'entraînement d'un tel modèle s'avère affolant. Et dans cette course folle au plus gros modèle, les seuls qui y trouvent finalement leur compte sont les entreprises évoluant sur le marché du carbone, au grand dam de la planète.

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