La Cnil dit non à la vidéosurveillance algorithmique dans les rues d'Orléans

Saisie par la Quadrature du Net, la Commission nationale de l'informatique et des libertés a rappelé Orléans à l'ordre : coupler une caméra de vidéosurveillance à une captation automatisée du son est illicite. La ville avait lancé une expérimentation avec la start-up Sensivic pour détecter les bruits anormaux sur la voie publique pour repérer plus facilement les agressions physiques, les vols...

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La Cnil dit non à la vidéosurveillance algorithmique dans les rues d'Orléans

La Quadrature du Net (QDN), une association qui veut promouvoir et défendre les libertés fondamentales dans l'environnement numérique, a annoncé le 27 septembre que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) lui avait donné raison sur le système de vidéosurveillance testée dans la ville d'Orléans (Centre-Val de Loire).

Celle-ci avait passé en 2021 une convention avec Sensivic pour expérimenter pendant un an des détecteurs sonores capables de détecter des sons anormaux afin de lutter contre les infractions dans l'espace public. La start-up proposait son service à titre gracieux et le contrat n'engageait pas la municipalité à pérenniser l'expérimentation.

Détecter des bruits anormaux

Les détecteurs étaient installés sur des caméras de vidéosurveillance présentes dans les rues d'Orléans. "Leur objectif est d'améliorer les performances des installations de sécurité existante ou à venir en apportant la détection en temps réel d'évènements anormaux comme des coups de feu, des intrusions, des détonations, des cris de peur, des bris de verre etc", ont écrit les deux parties dans le contrat. La convention prévoyait l'installation de deux enregistreurs sur une première période test pour valider leur fonctionnement, puis le déploiement de dispositifs supplémentaires pour compléter l'expérimentation.

La technologie de Sensivic repose sur un algorithme d'apprentissage automatique qui analyse en permanence "le son ambiant" pour pouvoir y détecter des anomalies. Précision très importante : les détecteurs n'enregistrent pas les sons. Seule "une notification d'anomalie" est transférée via une application dédiée aux agents de sécurité. Ils peuvent alors consulter les images des caméras pour localiser l'événement et intervenir si nécessaire. C'est parce que le son n'est pas enregistré puis stocké que la jeune pousse pensait échapper à la règlementation des données personnelles.

Une technologie floue, d'après la QDN

La QDN a saisi la Cnil en décembre 2021 et déposé une requête en annulation devant le tribunal administratif d'Orléans. Elle juge la convention peu précise sur le fonctionnement exacte de la technologie : "impossible de savoir exactement ce que recouvre cette notion d'anomalies (...) l'anomalie n'est donc jamais précisément définie et laissée à la libre interprétation de la police ou de l'entreprise privée - au dépend de la population et de l'Etat de droit".

L'autorité française lui a répondu dans un courrier datant du 27 septembre 2023. Elle estime que "le couplage des données sonores et visuelles constitue un traitement de données à caractère personnel, en ce qu'il est susceptible de permettre la réidentification d'une personne physique". Les règles du Règlement général à la protection des données (RGPD) sont donc applicables. Elle conclut, rappelant les dispositions du code de la sécurité intérieure, que "l'installation et l'exploitation du dispositif (...) couplé à la vidéoprotection étaient alors illicites". Ainsi, Orléans et la start-up ont chacune reçu un rappel à l'ordre.

L'expérimentation du dispositif de vidéosurveillance a pris fin le 27 octobre 2022. L'Usine Digitale a contacté la municipalité afin de connaître les conclusions de ce test et si un déploiement était prévu (il nécessiterait des ajustements pour être légal). Aucune réponse n'a pour l'instant été fournie. Le tribunal administratif d'Orléans n'a pas non plus encore rendu sa décision.

La vidéosurveillance algorithmique autorisée pour les JO 2024

Des questions juridiques similaires pourraient se poser avec le dispositif de sécurité prévu pour encadrer les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. La loi du 19 mai 2023 prévoit qu'à titre expérimental et jusqu'au 31 mars 2025, les images collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection autorisés ou au moyen de caméras installées sur des aéronefs dans les lieux accueillant ces manifestations et à leurs abords ainsi que dans les véhicules et les emprises de transport public et sur les voies les desservant, peuvent faire l'objet de traitements algorithmiques.

Interrogée sur France 3 dans l'émission "Dimanche en politique" le 24 septembre, Amélie Oudéa-Castéra, la ministre des sports, a déclaré que l'expérimentation pourrait être prolongée si "elle fait ses preuves".

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