Le monde entre dans l'ère Gemini
A la Une
Google a tenu la semaine dernière sa grande conférence I/O. Il aurait pu la renommer "A/I" tant le sujet était omniprésent. Alors qu'OpenAI tente des coups de pression contre le moteur de recherche, cœur économique de Google, ce dernier s'avère... très serein. Sa famille de modèles Gemini excelle dans ses versions 2.5 Flash et Pro, et il enchaîne les innovations dans la vidéo, avec Veo 3 et Flow, ou dans la perception de l'espace avec le projet Astra, un prototype d'assistant universel capable de comprendre ce que regarde l'utilisateur et de réagir en conséquence. C'est la vague technologique la plus prometteuse qu'on ait jamais vu, d'après Sundar Pichai.
Science fiction ? Promesses lointaines ? Loin de là : Astra vient d'être intégré à Gemini Live, version de l'assistant capable de tenir une conversation à l'oral en temps réel, qui se voit au passage aussi intégrée au moteur de recherche. Peu enclin à nous ébahir à chaque nouvelle fonctionnalité, force nous a été de reconnaître lors d'un test en conditions réelles sur notre propre smartphone qu'il s'agit d'un vrai changement de paradigme.
La recherche évolue aussi, mais là où d'aucuns se concentreront sur les AI Overviews et le nouvel AI Mode qui font disparaître les "10 liens bleus" du moteur au profit de résumés puisant dans différentes sources, ce sont bien ces capacités "next gen" qui ont retenu notre attention. D'autant plus que Google se positionne à nouveau sur le marché des lunettes connectées, avec un concurrent aux Ray-Ban Meta développé en collaboration avec Samsung. Combinées à Gemini, ces lunettes portent la promesse du futur de l'informatique, au-delà du smartphone, où la machine s'adaptera enfin à l'humain et non l'inverse. Mal avisés sont ceux qui seraient tentés de railler l’idée en évoquant Google Glass. Beaucoup de choses ont changé.
Dans l'actu
OpenAI s'offre la start-up Io lancée par Jony Ive, le designer de l'iPhone. Montant de l'opération : 6,5 milliards de dollars, le tout en actions. Mais pourquoi s'emparer d'une autre start-up alors qu'OpenAI vit largement de levées de fonds ? Il semblerait que la raison soit simple : la société veut se tourner vers le hardware. Pour l'heure, beaucoup de spéculations et peu de détails sur le fameux gadget alimenté par l'IA hormis le fait qu'il rentre dans une poche. En attendant, Apple peut se mordre les doigts d'avoir perdu l'un de ses meilleurs éléments.
Anthropic frappe fort avec ses modèles Claude 4. Deux modèles font leur apparition : présentés comme les meilleurs du secteur, Opus 4 et Sonnet 4 sont capables d'analyser de grands ensembles de données, exécuter des tâches à long terme et réaliser des actions complexes, selon Anthropic. Ils sont particulièrement adaptés au développement d'agents IA et au codage. Nota bene : la start-up a publié Opus 4 avec des garanties renforcées afin d'éviter toute dérive potentielle. S'il peut coder pendant 7 heures, ce modèle s'avère également très fort pour aider au développement ou à l’acquisition d’armes chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires. Oups !
Elon Musk profite de son poste au DOGE pour pousser Grok au sein du gouvernement américain. C'est une nouvelle qui risque de faire beaucoup de bruit. Le milliardaire et son équipe DOGE (département d'Etat pour l'efficacité gouvernementale) étendent l'utilisation de son chatbot d'intelligence artificielle au sein des instances américaines, notamment le département de la Sécurité Intérieure pour analyser des données. Une telle utilisation du chatbot pourrait à la fois enfreindre les lois sur les conflits d’intérêts et mettre en danger des données sensibles concernant des millions d'Américains. Mais pour Musk, tous les coups sont permis pour être le numéro un dans le domaine de l'IA.
Oracle va acheter pour 40 milliards de dollars de puces Nvidia pour le nouveau centre de données d'OpenAI. En cours de construction dans la ville texane d'Abilene, aux Etats-Unis, ce data center sera doté de pas moins de 64 000 "super puces" GB200 fabriquées par Nvidia. S'appuyant sur ce premier modèle, OpenAI souhaiterait développer cinq à dix campus similaires, d'une capacité supérieure à 1 gigawatt pour mener à bien le projet Stargate. Reste à savoir si les investissements auront bien lieu, la hausse des tarifs douaniers menaçant la bonne réalisation de ces projets.
Les trains aussi mettent le grappin sur l'IA ! C'est l'interview de la semaine. Directeur numérique du groupe SNCF depuis 2021, Julien Nicolas a pris du galon en mars dernier, se voyant confier le pilotage de la stratégie IA du Groupe ainsi que la direction d'e.SNCF Solutions, la fabrique numérique du groupe SNCF. Développement d'un "SNCF GPT" dans un environnement sécurisé, éco-conduite assistée par IA, maintenance prédictive, acculturation et formation des salariés, qualité de la donnée,... autant de sujets évoqués qui reflètent l'ambition portée par le géant français des transports : faire évoluer sa gouvernance numérique.
L'image de la semaine
« Quand Tim découvre que "Made in USA" ne se fait pas sur iCloud. » (Généré par o3 d'OpenAI).
Focus : Mistral AI maintient sa place de challenger européen face aux Big Tech
Officiellement lancée en avril 2023, elle vaut aujourd'hui quelques 6 milliards de dollars et a levé plus d'un milliard de dollars. Cette semaine encore, Mistral AI a fait l'actu. Retour sur les annonces phares.
Dell embarque les modèles de Mistral AI dans son projet d'AI Factory. Flexibilité, sécurité et passage à l'échelle sont les mots d'ordre de ce partenariat établi entre les deux entreprises. Le fleuron français met à disposition ses dernières innovations, incluant Le Chat Enterprise, afin que Dell puisse doper son AI Factory pour fournir des services destinés à développer des applications d'IA auprès de ses clients.
Sur un autre front, Mistral AI s'associe à Capgemini et SAP pour démocratiser l'usage de l'IA générative dans les domaines les plus réglementés (services financiers, aérospatiale, défense, énergie, secteur public...). En combinant les modèles de la pépite française, la plateforme SAP Business Technology Platform et son expertise métier, l'ESN entend déployer plus de 50 cas d'usage dans des environnements contraints.
Côté modèles, Mistral AI assure avec Devstral, un agent spécialisé dans le développement informatique. Puisque l'heure est à l'agentique, la start-up lance son propre modèle open source dédié aux tâches d'ingénierie logicielle. Capable de rivaliser avec ceux de Google, Anthropic ou OpenAI, Devstral a l'avantage de pouvoir être déployé en local et pas seulement dans le cloud, marquant un point de plus pour la souveraineté. In fine, Mistral continue d'offrir des alternatives solides aux géants de l'IA.
Les applications métier
Armée – Comment le ministère des Armées a su s'emparer de l'IA générative avec brio
Le ministère des Armées, par le biais de son Secrétariat général pour l’administration, a déployé fin 2024 une plateforme d'IA générative destiné à plus de 60 000 utilisateurs. Développée et hébergée en interne, elle beaucoup évolué depuis six mois et sera "méconnaissable d'ici la fin de l'année", d'après le directeur du projet et patron du centre d’expertise données et IA du ministère des armées, Guillaume Vimont. Retour sur la recette de ce succès.
Gestion financière – Le français Pigment s'associe à Google Cloud pour accélérer dans la planification dopée à l'IA
La licorne française prévoit de s'appuyer sur l'infrastructure et les solutions d'IA de Google Cloud, y compris Vertex AI et AgentSpace, pour soutenir et faire évoluer sa croissance internationale. L'accent sera mis sur la construction d'agents d'IA spécialisés dans la planification.
Robotique – Foxconn s'est appuyé sur Nvidia pour mettre au point son robot infirmier Nurabot
Permettre au personnel hospitalier de se décharger des tâches les plus répétitives et fatigantes : c'est l'objectif que s'est fixé le géant de l'électronique Foxconn, avec son Nurabot. Ce robot, qui s'appuie sur les plateformes d'intelligence artificielle et robotiques de Nvidia, peut transporter des médicaments et guider les patients et visiteurs. Un hôpital taïwanais teste actuellement l'appareil.
Banque – La start-up japonaise Sakana AI conclut un accord majeur avec Mitsubishi UFJ Financial Group
Le groupe bancaire nippon pourra bénéficier, pendant plus de trois ans, des agents d'intelligence artificielle et des conseils de Sakana AI. Depuis son lancement par deux anciens chercheurs de Google, cette start-up s'est démarquée des mastodontes de l'IA générative tels qu'OpenAI.