Des employés de DeepMind prennent position contre les contrats militaires de Google

Un peu plus de 200 employés de DeepMind, la division IA de Google, ont dénoncé la discordance existante entre les principes IA de l'entreprise et les contrats passés avec des organisations militaires. Est notamment pointé du doigt le fameux projet Nimbus, un contrat passé avec l'armée et le gouvernement israéliens.

Partager
Des employés de DeepMind prennent position contre les contrats militaires de Google

Il y a des appels au changement qui restent lettre morte. C'est le cas de la lettre ouverte envoyée par des employés de DeepMind à Google, sa maison mère. L'objet : demander au géant de la technologie d'abandonner ses contrats avec des organisations militaires. Datée du 16 mai dernier, elle commence par déclarer que les salariés sont "préoccupés par les récents rapports sur les contrats de Google avec des organisations militaires".

Elle ne fait pas référence à des armées en particulier, précisant ainsi "nous soulignons que cette lettre ne concerne pas la géopolitique d’un conflit particulier", comme le révèle le magazine Time qui a pu lire une copie du document. Plus loin, les quelques 200 signataires – tous employés de la division IA de Google – font toutefois référence à un projet en particulier : Project Nimbus.

Un contrat juteux avec Israël qui passe mal

Project Nimbus s'avère être un contrat signé en avril 2021 visant à rationaliser toutes les opérations gouvernementales et militaires d'Israël en un seul service cloud. Remporté par Google et Amazon, ce contrat de 1,2 milliard de dollars inclut également d'autres services additionnels : des outils d'intelligence artificielle et d'apprentissage automatique avancés, comme l'indique The Intercept dans un articlé daté de 2022. Le contrat empêcherait également Google de refuser des services à des entités gouvernementales israéliennes spécifiques, telles que les Forces de défense israéliennes (FDI).

Après l'annonce de la signature d'un tel deal avec Israël, les employés des deux firmes n'ont pas manqué d'élever la voix et ont fait savoir par une autre lettre ouverte, publiée par The Guardian, qu'ils condamnaient le projet. "Nous ne pouvons pas soutenir la décision de notre employeur de fournir à l’armée et au gouvernement israéliens une technologie utilisée pour nuire aux Palestiniens".

Une surveillance accrue et une collecte illégale de données

Ce cloud donnerait à Israël des capacités de détection faciale, de catégorisation automatisée des images, de suivi des objets et même d’analyse des sentiments qui prétend évaluer le contenu émotionnel des images, de la parole et de l’écriture. Selon les employés d'Amazon et Google, le projet est tout autre : "Cette technologie permet une surveillance accrue et une collecte illégale de données sur les Palestiniens, et facilite l'expansion des colonies illégales d'Israël sur les terres palestiniennes", peut-on lire dans la lettre datée du 12 octobre 2021.

"Nous ne pouvons pas fermer les yeux, car les produits que nous fabriquons sont utilisés pour priver les Palestiniens de leurs droits fondamentaux, pour forcer les Palestiniens à quitter leurs maisons et pour attaquer les Palestiniens dans la bande de Gaza – des actions qui ont donné lieu à des enquêtes pour crimes de guerre par la Cour pénale internationale". Dès lors, les employés des deux firmes appelaient alors à "cesser de conclure des contrats avec toutes les organisations militarisées aux États-Unis et au-delà".

Une dissonance entre les divisions IA et cloud

Par cette lettre, le personnel pointe également du doigt l'ambivalence de la vision des entreprises technologiques : "Alors que nous promettons publiquement d’aider et d’aider nos utilisateurs, des contrats comme celui-ci facilitent secrètement la surveillance et le ciblage de ces mêmes utilisateurs". La seconde lettre ouverte datée de mai dernier renforce l'idée de tensions au sein de Google entre sa division IA, portée sur le développement de technologies, et sa division cloud, qui vend ces technologies sous forme de services à des organisations militaires.

En avril dernier déjà, soit peu de temps avant la publication de la lettre ouverte par les employés de DeepMind, Google a annoncé avoir licencié 28 employés après que certains d'entre eux ont participé à des manifestations contre le contrat de cloud de l'entreprise avec le gouvernement israélien. D'après le géant, un petit nombre d'employés manifestants sont entrés et ont perturbé le travail dans quelques bureaux non spécifiés. "Entraver physiquement le travail d'autres employés et les empêcher d'accéder à nos installations constitue une violation flagrante de nos politiques et un comportement totalement inacceptable", a déclaré l'entreprise dans un communiqué.

Google reste de marbre

Aujourd'hui, force est de constater que ni Google ni Amazon n'ont rompu leur contrat avec Israël. Lors d'une réunion publique organisée par DeepMind en juin, les dirigeants ont été invités à répondre à la lettre, rapporte le Time. A cette occasion, la directrice des opérations de DeepMind, Lila Ibrahim, a répondu à la question. Elle a déclaré aux employés que DeepMind ne concevrait ni ne déploierait aucune application d'IA pour l'armement ou la surveillance de masse, et que les clients de Google Cloud étaient juridiquement liés par les conditions de service et la politique d'utilisation acceptable de l'entreprise. Pas sûr que cette réponse suffise à apaiser les tensions au sein de la firme.

SUR LE MÊME SUJET

Sujets associés

NEWSLETTER L'Usine Digitale

Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.

Votre demande d’inscription a bien été prise en compte.

Votre email est traité par notre titre de presse qui selon le titre appartient, à une des sociétés suivantes...

Votre email est traité par notre titre de presse qui selon le titre appartient, à une des sociétés suivantes du : Groupe Moniteur Nanterre B 403 080 823, IPD Nanterre 490 727 633, Groupe Industrie Service Info (GISI) Nanterre 442 233 417. Cette société ou toutes sociétés du Groupe Infopro Digital pourront l'utiliser afin de vous proposer pour leur compte ou celui de leurs clients, des produits et/ou services utiles à vos activités professionnelles. Pour exercer vos droits, vous y opposer ou pour en savoir plus : Charte des données personnelles.

CHERCHE TALENTS NUMERIQUE

Les formations USINE DIGITALE

Toutes les formations

ARTICLES LES PLUS LUS