L'Armée de l'air s'appuie sur l'intelligence artificielle pour optimiser la formation de ses pilotes

Profitant du salon Eurosatory consacré à la défense et à la sécurité, l'Armée de l'air a dévoilé un cas d'usage intégrant l'intelligence artificielle. Cherchant à simplifier le travail de formation des pilotes de chasse et de transport, l'organisation a développé quatre modèles de prédiction pour chaque étape de la formation d'un pilote, depuis l'apprentissage de base jusqu'au brevet, s'appuyant sur une mine d'or de données internes.

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L'Armée de l'air s'appuie sur l'intelligence artificielle pour optimiser la formation de ses pilotes
(De gauche à droite) : Bertrand Rondepierre, directeur de l'AMIAD, le colonel bureau commandant des écoles de formation des personnels navigants et le lieutenant colonel Schneider, commandant en second de l'escadron des systèmes d'information opérationnel et de cyber défense.

L'intelligence artificielle se met au service de la formation. Profitant du salon Eurosatory, l'Armée de l'air a présenté cette semaine devant le Ministre des Armées, le Chef d’Etat-Major de l’Armée de Terre et le Délégué général à l’Armement (DGA) un cas pratique reposant sur l'utilisation de l'IA. Avec pour problématique de réduire le coût de formation des élèves pilotes de chasse et de transport tout en assurant une qualité de cet enseignement, l'Armée de l'air a décidé de s'appuyer sur cette technologie.

"Aujourd'hui, l'intelligence artificielle favorise l'acquisition d'un haut niveau de compétences afin de soutenir un savoir-faire opérationnel de premier plan reconnu à l'international. En termes de formation, il existe deux asymptotes dont nous nous rapprochons tout le temps sans jamais complètement les atteindre. Le continuum de formation et l'individualisation des parcours", explique le colonel bureau commandant des écoles de formation des personnels navigants. "C'est sur ce deuxième volet que l'intelligence artificielle agit le mieux en permettant une individualisation fine de la trajectoire d'un stagiaire".

La validation de la formation, une épreuve du feu

La formation d'un personnel navigant repose sur un cycle strict de sélection au recrutement, de la formation jusqu'au brevet, puis, de progression continue en unité navigante, poursuit le colonel. Cet enseignement repose également sur le retour dans les écoles de pilotes qualifiés "afin de transmettre à leur tour ce qu'ils ont un jour reçu". Seulement, cette formation est aussi contraignante à plusieurs niveaux : elle est longue, exigeante et coûteuse.

La formation d'un pilote de chasse jusqu'à son premier avion d'armes dure presque 4 ans. Pendant ce temps, il aura pris part à plus de 350 face à face pédagogiques, qui comportent du vol nécessairement, mais également de la simulation à hauteur de 40%. Elle est également exigeante car un peu moins de 10% du flux ne parvient pas à aller jusqu'au bout et devra être réorienté vers une autre filière.

Enfin, elle met en œuvre "des matériels performants" et au-delà du coût du maintien en conditions opérationnelles, du prix du carburant, de la rémunération des instructeurs, du fonctionnement de nos plateformes aéroportuaires, contrôleurs, pompiers, il faut toute une armée pour mettre en œuvre la puissance aérienne et pour instruire les presque 600 stagiaires que nous avons en formation dans nos écoles", constate le colonel.

L'IA au service de l'individualisation de la trajectoire d'un stagiaire

Afin de suivre et d'optimiser la formation de ces stagiaires, les écoles de formation du personnel navigant utilisent depuis une douzaine d'années maintenant un logiciel dénommé Spirits qui, par son interface et ses outils de synthèse, s'est rapidement répandu au-delà des écoles dans toute l'Armée de l'air et l'espace, la Marine Nationale et même la Direction Générale de l'Armement, apprend-on.

Le logiciel s'appuie sur une base de données qui comprend plus de 300 000 fiches de débriefing, incluant plus de 5 millions d'exercices débriefés et autant d'éléments de capacité générale. "Toutes ces données sont un véritable trésor, mais malheureusement inexploitable à l'échelle humaine. Et c'est là où l'intelligence artificielle intervient en rendant possible leur analyse de façon exhaustive et objective", soutient le lieutenant colonel. L'Armée a donc développé en interne une solution d'IA capable d'optimiser l’accompagnement de ces 600 élèves-pilotes de chasse/transport et reposant sur cette mine d'or de données. L'initiative a été conduite par la Direction des Ressources Humaines de l'Armée de l'Air et de l'Espace avec la société Headmind Partners dès 2022.

Une mise en service dès cette année

Aujourd'hui, la solution est passée à l'échelle industrielle et pourra rentrer en service dès cette année sous la direction du centre de service des données au sein de l'escadron des systèmes d'information opérationnelle et de cyber défense. "Concrètement, nous avons développé quatre modèles de prédiction différents pour chaque étape de la formation d'un pilote depuis la formation de base jusqu'au brevet de pilote de chasse ou de transport", détaille le lieutenant colonel Schneider, commandant en second de l'escadron des systèmes d'information opérationnel et de cyber défense.

Pour chacune de ces étapes, un algorithme compare les compétences d'un élève avec le niveau moyen des pilotes qui ont réussi leur formation et établit un pronostic de réussite qui se situe au sein d'une zone dédiée. "Ce pronostic, qui identifie ainsi des compétences et des élèves en difficulté, a ensuite deux vertus principales pour l'individualisation des parcours. Premièrement, il permet d'identifier des signaux faibles qui permettent ensuite d'insister sur les compétences sans difficultés pour ensuite faire progresser l'élève. Et deuxièmement, il permet de contribuer à l'amélioration de la standardisation pédagogique".

Un cas d'usage qui pourrait s'étendre à l'ensemble des Armées

A date, le colonel Bureau, commandant des écoles de formation des personnels navigants, considère que ce premier cas d'usage peut s'étendre "à l'ensemble des utilisateurs du logiciel Spirits au sein du ministère, c'est-à-dire tous les stagiaires des écoles de formation, que ce soit les navigateurs, les pilotes de drones, mais également nombre de formations dans les forces, sur Rafale, sur A400M, mais également dans la Marine Nationale et la Direction Générale de l'Armement".

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