Et si vous échangiez vos cadeaux de Noël pour Ada, un roman sur une intelligence artificielle

A partir de l'évaporation d'une intelligence artificielle, Antoine Bello mène avec Ada une réflexion passionnante sur les enjeux éthiques de la recherche et la nature profonde de la littérature, et donc de ce qui fait l'Humanité. 

Un roman qui ne se lâche pas, malgré quelques facilités qui s'expliqueront une fois l'ouvrage refermé. 

Veinards, vous ne connaissez pas encore la séduisante Ada...

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Et si vous échangiez vos cadeaux de Noël pour Ada, un roman sur une intelligence artificielle

Ada est le prototype du roman difficile à critiquer, car celui qui l'a lu sait quelque chose que ne sait pas celui qui ne l'a pas encore lu et qu'on hésite à révéler pour mieux argumenter ou à taire et passer à côté de l'essentiel. Merci Antoine Bello.

Mais de quoi s'agit-il ? Un flic intègre tout droit sorti d'un film made in USA est appelé pour enquêter parce qu'Ada a disparu. Jusqu'ici tout est normal. Sauf que la disparition a eu lieu dans l'une des start-up les plus prometteuses de la Valley et qu'Ada est le nom donné par ses fondateurs à une intelligence artificielle qu'ils développent. Sa mission ? Réussir à écrire romance façon Harlequin qui devra être un best seller.

Un écrivain qui connaît l'entreprise

Le flic mène donc son enquête dans le monde des start-up californiennes et on sent bien qu'Antoine Bello, écrivain et businessman (il est le cofondateur de la société Ubiqus) connaît bien le monde de l'entreprise, loin des caricatures qu'on trouve trop souvent dans les romans.

Par ailleurs, l'écrivain s'amuse avec ce roman bien troussé aux allures de "page-turner" à mener deux réflexions de front. Au-delà des péripéties, l'auteur, un admirateur de Borgès et sa bibliothèque contenant tous les livres potentiels grâce à une combinatoire infinie des lettres existants, s'interroge sur ce qui fait la littérature et le succès. Le best-seller est-il dû à la singularité irréductible de son auteur ou n'est-il que l'assemblage d'éléments identifiés et savemment agencés. Les pages où Logan (le policier) qui a pour passion d'écrire des haïkus, soit la forme courte la plus codifiée et dont on pourrait imaginer la plus facilement "automatisable" montre de façon passionnante le travail de tout auteur pour atteindre une perfection éphémère...

De même, à mesure que l'enquête progresse et qu'Ada réapparaît de façon inattendue, le livre prend le tour d'une réflexion sur ce que pourrait être une intelligence artificielle. La question est la même : une machine peut-elle copier l'esprit humain Et, si oui, quelles en seront les conséquences ? Ou y a-t-il en chacun de nous quelque-chose de fondamentalement non réductible à un algorithme aussi savant soit-il ? Les spécialistes de la question trouveront peut-être cette dimension du récit un peu trop light, mais elle a le mérite de poser de manière accessible quelques-uns des défis philosophiques posés par l'I.A.

Des clichés qui révèlent le talent du romancier

Mais pour mener ses réflexions à bien, Antoine Bello utilise son art du récit, évitant les digressions qui pourraient rebuter les lecteurs non inités, les injectant dans l'enquête pour l'aider à progresser.

Jusqu'au retournement final, certains s'énerveront peut-être de certains clichés ou facilités, de dialogues un peu trop fabriqués. Et pourtant, ils sont la preuve ultime de l'immense maîtrise et talent d'Antoine Bello. Ce dernier connu pour avoir écrit une trilogie dont le premier tome s'appelle Les falsificateurs. Bello prouve qu'il est de cette confrérie dont on sent, roman après roman, très proche. Comme un autoportrait de l'écrivain en faussaire génial.

Ada, par Antoine Bello, Editions Gallimard

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