Vidéosurveillance : mis en cause par La Quadrature du Net, le député Philippe Latombe se défend de tout conflit d'intérêts
La Quadrature du Net, association française de défense des libertés fondamentales dans le numérique, a adressé mercredi un courrier à la présidente de la Cnil dans lequel elle dénonce des "conflits d'intérêts" et des manquements du député et commissionnaire de la Cnil Philippe Latombe. Celui-ci se défend et voit dans cette attaque un "militantisme" peu adapté aux enjeux sur la vidéosurveillance.
"C'est quoi un conflit d'intérêts ?" questionne Philippe Latombe. Interrogé par L'Usine Digitale, le député MoDem de Vendée, commissaire de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) depuis un an, dit ne pas comprendre l'offensive accusatrice qu'a lancée La Quadrature du Net à son encontre, mercredi 5 septembre.
L'association française, connue pour ses combats de défense et de promotion des libertés fondamentales dans le numérique, lui reproche en effet un manque d'indépendance vis-à-vis du secteur de la vidéosurveillance, dans un courrier rendu public et adressé à la présidente de la Cnil, Marie-Laure Denis.
Soupçons de conflit d'intérêts
Alors que le projet de loi JO relatif aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 a été adopté définitivement en avril, Philippe Latombe aurait, selon La Quadrature du Net, prévenu les acteurs membres de l'Association nationale de la vidéoprotection (AN2V) de la publication de décrets d'application du texte.
Ce que réfute en bloc le député, assurant que les éléments qu'il a communiqués lors d'un dîner n'étaient pas confidentiels. "Quand je dis qu'il y a des décrets et qu'ils sont passés à la Cnil, c'est d'ordre public puisque les convocations et les ordres du jour de la Cnil et du Conseil d'état sont publics", indique-t-il. Contactée, La Quadrature du Net n'avait pas répondu à la demande d'interview de L'Usine Digitale au moment de la publication de cet article.
Accusé également de se prononcer en faveur de l'extension de la vidéosurveillance, Philippe Latombe dit s'être exprimé dans ce cadre "en tant que député, co-rapporteur d'une mission parlementaire sur les images de sécurité" et non en tant que membre de la Cnil. "À chaque fois, en préambule, je dis que je n'ai pas vocation à m'exprimer au nom de la Cnil. Il ne peut pas y a voir de conflit d'intérêts", ajoute-t-il.
Philippe Latombe s'expliquera à la Cnil
Dans son courrier, La Quadrature du Net énumère divers points de la charte de déontologie de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. L'association demande aussi, en conclusion des quatre pages adressées à Marie-Laure Denis, d'envisager "des procédures relatives au manquement de ces règles".
Par mail, la Cnil confirme avoir bien reçu le courrier en question et annonce qu'elle "va procéder à une analyse des faits qui sont portés à sa connaissance". L'autorité, qui prévoit dans son fonctionnement interne d'intégrer à sa commission deux sénateurs et deux députés, ajoute que Philippe Latombe "n’a pas participé à l’examen par la Cnil du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, lors de la séance plénière du 8 décembre 2022".
De son côté, le parlementaire se dit "pas plus inquiet que ça" à l'idée d'éventuelles sanctions, rappelant qu'il n'a selon lui enfreint aucune règle. "J'ai demandé à Marie-Laure Denis la possibilité de m'exprimer au collège de demain [jeudi 7 septembre], donc je m'expliquerai auprès de mes collègues commissaires et on aura une discussion à huis clos sur le sujet", précise-t-il.
Une "posture militante"
Le député MoDem semble toutefois avoir du mal à digérer l'attaque, qu'il estime être le symptôme d'une "posture militante" de l'association, avec laquelle il n'a pas échangé depuis la parution de la lettre. D'après lui, son appartenance à la majorité présidentielle lui vaudrait en effet davantage de velléités de la part de La Quadrature du Net que ses positions concernant la vidéosurveillance.
"La Quadrature n'est pas contente de la décision du Conseil constitutionnel, qui a validé le texte JO, et en veut à la Terre entière, considère Philippe Latombe. Mais je ne pense pas être la bonne personne à attaquer sur ce sujet. Comme je l'ai dit dans le rapport d'information que j'ai rendu avec Philippe Gosselin, je pense que nous n'avons pas d'autre choix que d'encadrer au maximum la vidéoprotection, dont la vidéoprotection algorithmique, puisqu'elle va arriver de toute façon."
L'homme politique dit ne pas en vouloir à l'association et continuer à partager avec elle de nombreuses causes et préoccupations pour la vie privée des Français. "J'aime beaucoup La Quadrature dans ce qu'elle a fait, elle a porté de très beaux combats, mais se focaliser là-dessus aujourd'hui, je pense que c'en est un mauvais", juge-t-il. Le député signale aussi qu'il n'envisage pas d'action en justice.
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