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Télécoms : face aux menaces du numérique, la résistance s'organise
Intérêt de plus en plus prononcé de Google et Facebook pour l’infrastructure, banalisation des équipements pour cause de virtualisation…
Les équipementiers et les opérateurs du secteur télécoms vont de nouveau voir leurs modèles bousculés.
Mais ils ont les moyens de résister, et la plupart a d’ailleurs déjà commencé.
Emmanuelle Delsol
"L’évolution vers la virtualisation du réseau va se répercuter sur le modèle de service, le modèle d’opération, le modèle commercial… le business model des équipementiers", insiste Alain Fiocco, le directeur du Paris innovation research lab (PIRL) de Cisco, en charge de la R&I de Cisco France. Les équipements spécifiques à certaines fonctions, comme le routage, feront petit à petit place à des logiciels qui tiendront leur rôle. "L’équipementier pourrait ne plus vendre que du logiciel, et l’opérateur pourrait ne plus avoir sa propre infrastructure," imagine même Michel Corriou, le directeur réseaux et sécurité de l’IRT BCom.
Du matériel au logiciel, à la virtualisation
La virtualisation rend possible l’installation de fonctions logicielles de réseau sur un matériel banalisé. Et devrait en toute logique faire disparaitre partiellement les équipements spécifiquement développés pour des fonctions spécifiques. De quoi bousculer le modèle des équipementiers, premiers perturbés. Ceux-ci se différenciaient justement par l’innovation embarquée dans... leurs équipements. En réalité, ce sont eux qui jouent un rôle central dans cette transformation. Loin de scier la branche sur laquelle ils sont assis, ils développent les outils de cette virtualisation et basculent encore davantage vers un inévitable et indispensable modèle de vente de logiciels et de services. "Le métier d’Ericsson, c’est le logiciel", affirmait déjà à l’Usine Digitale en 2013, Hans Vestberg, le PDG du numéro deux mondial.
Des équipementiers déjà en mouvement
Nokia (et Alcatel-Lucent) ainsi que Huawei, et même Cisco, ont eux-aussi, tous, très vite développé leurs propres environnements de virtualisation. Il leur reste désormais à se différencier à travers ces derniers. La complexité de ces systèmes permet d'innover en particulier dans l'optimisation, la performance et la qualité d'exécution. Mais les équipementiers doivent surtout trouver un modèle économique pour compenser l'inévitable réduction de marges qu’impose le passage du matériel au logiciel. Pour l’instant, la plupart misent sur des services d’accompagnement de leurs clients traditionnels, les opérateurs, mais s'ouvrent aussi à d’autres secteurs, comme la ville, la vidéo, la santé, la finance…
La virtualisation, à petits pas
Nombre d’observateurs du secteur relativisent l’impact à court terme de la virtualisation. "L’histoire va dans ce sens, sans hésitation aucune, confirme Hervé Collignon, vice-président et partner chez AT Kearney, mais les opérateurs n’y vont encore que très prudemment. Et encore, seulement, les plus grands." Ne serait-ce que parce qu’il y a bien une promesse d’économie, mais qu’elle n’est pas encore très imposante. "On estime entre 20% et 25% d’amélioration de la productivité des réseau", continue Hervé Collignon. L’efficacité gagnée en passant du matériel à des fonctions virtualisées est en effet en partie contre balancée par la gestion des couches logicielles et des échanges dans le réseau.
Seuls les grands opérateurs se lancent
Vincent Bonneau, directeur de la business unit innovation de l'Idate explique même ne pas être "persuadé que le modèle arrivera à se répandre au-delà de modèles actuels, incrémentaux." Autrement dit, aucun opérateur ne remplace son infrastructure par une autre d’un seul coup. L’opération serait trop lourde, trop complexe, trop chère. Ils procèdent donc progressivement. Comme ils l’ont déjà fait, par exemple, pour la transition de leurs cœurs de réseau vers le tout IP. Ainsi, seuls les plus gros opérateurs du monde, comme Orange, l’espagnol Telefonica ou l’américain Verizon tentent prudemment l’aventure de la virtualisation. Plutôt dans le cadre de projets pilotes, qui plus est. La vente d'équipements devrait perdurer encore quelques années, permettant aux équipementiers d'engager le pivot de leur modèle.
Facebook n’a plus le temps d’attendre
Le temps serait ainsi du côté des télécoms ? Difficile à affirmer… La demande croissante des internautes, la complexité des services, et la future 5G mobile qui devra s’adapter aussi bien aux objets connectés qu’au live streaming de vidéos 4K, vont imposer des réseaux souples et agiles. Et la virtualisation finira par s’imposer. Et penser qu’il est urgent d’attendre, ce serait aussi oublier les géants du numérique, toujours avides d’accélérer la cadence. Des travaux comme ceux annoncés récemment par Facebook avec Terragraph et Aries vont dans le même sens d’une infrastructure plus neutre, issue de l’électronique grand public, sur laquelle ce sont le système et le logiciel qui font la différence.
Facebook, les deux pieds dans l’infrastructure télécoms
Mais en annonçant ces projets de développement d'infrastructure, l’entreprise de Mark Zuckerberg a fait franchir un cap au secteur numérique. Il ne se contente plus d’imaginer des technologies pour combler les "trous" dans la toile, avec des ballons (Google Loon) ou une aile solaire et un laser (Facebook Aquila). Cette fois, c’est aux grandes villes que Facebook s’attaque. Sur le terrain de jeu habituel des opérateurs et équipementiers télécoms. Il a besoin – pour les échanges dans Facebook Live, sa vidéo 3D, pour l’utilisation d’Oculus Rift, … - d’infrastructure denses et à très haut débit pour les internautes hyperactifs que sont les urbains. Et il n’a pas le temps d’attendre, ni la 5G, ni les déploiements de la fibre optique.
Du côté du numérique, plutôt que dans le camp ennemi
Face à l’ascension de ces ogres californiens sur le terrain de jeu des télécoms, Ericsson a là-encore montré l’exemple. Il a choisi très tôt la collaboration plutôt que la confrontation. Il s’est par exemple inscrit dès son lancement en 2013 dans l’initiative Internet.org de Mark Zuckerberg, pour développer et déployer un nouveau type d’infrastructure. Pour ce qui est de Terragraph et Aries, Facebook n’a rien dit encore des détails techniques ni d'éventuels partenariats avec des industriels des télécoms.
Des opérateurs en mue permanente
Orange qui a longtemps fustigé Google, collabore aussi avec Google sur Google Fi (fibre optique) et a aussi accompagné Facebook sur certains développements en Afrique. Le modèle des opérateurs est lui-aussi mis en danger par ces évolutions. Même si l'attaque est moins directe que sur leurs fournisseurs d'équipements. La qualité des services des opérateurs fait toute la différence auprès de leurs abonnés. Et cette qualité provient en particulier de leur capacité à investir dans la bonne combinaison d’équipements au bon endroit. Si le matériel se banalise, les opérateurs aussi devront faire de nouveaux choix. S’ils prennent leur temps pour adapter leurs réseaux, beaucoup ont aussi entamé une mutation vers des modèles hors des seuls réseaux télécoms. Dans la ville connectée, la-santé ou même la banque.
Mais comme Orange, beaucoup ont aussi compris que mieux valaient être du côté des grands du numérique que dans le camp de leurs ennemis. Une stratégie d’autant plus judicieuse qu’aucun géant du numérique n’a intérêt non plus à se mettre à dos les historiques des télécoms. Pour se développer encore davantage, Facebook ou Google ont besoin qu’Internet soit accessible partout tout le temps. Ils se lancent dans des projets d’infrastructure mais préfèreraient sans nul doute consacrer leurs investissements à leur cœur de métier.
Les télécoms ne sont pas morts, mais…
Peu de chances malgré tout que les télécoms ne meurent, soudain terrassées par ces plaies numériques. Non. Le secteur, le marché, la structure des entreprises vont être bouleversés… Mais dans cette tempête, équipementiers et opérateurs ont commencé à s’adapter. Pas le choix face à des acteurs riches, volontaristes, rapides, agiles, comme ceux du numérique, que le secteur a pu un temps toiser du haut de son ancienneté.
Ceux qui pivoteront l’emporteront. Et les bons vieux télécoms ont bel et bien leur mot à dire. Il suffit de regarder la transformation réussie d’Alcatel-Lucent avant de se faire acheter par Nokia ou les pivots entamés par Orange qui tente même d'uberiser les banques! Mieux encore, le numéro un des opérateurs américains, Verizon, est en passe d’acheter Yahoo… un géant du numérique qui, lui, n’a pas su pivoter ! Alors, tous les espoirs sont permis. A condition de ne pas se voiler la face.
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