Uber condamné à verser 1,2 million aux taxis, le petit bout de la lorgnette ?

Uber versera une amende aux taxis pour ne pas avoir respecté les règles associées à la maraude.

Une bien dérisoire réplique au géant californien qui masque l’incapacité des dirigeants à s’occuper de la réelle transformation de la notion de travail qu’induit son modèle.

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Uber condamné à verser 1,2 million aux taxis, le petit bout de la lorgnette ?

Le Tribunal de grande instance de Paris a finalement condamné Uber le 27 janvier à verser 1,2 million d’euros à l’Union nationale des taxis (UNT). C’est un privilège réservé aux taxis que de pouvoir être hélé n’importe où (et pas seulement à une station identifiée) et n’importe quand. C’est ce que l’on appelle la maraude. Les véhicules Uber ne font pas directement de même puisqu’il faut les réserver en ligne. Mais le délai entre la commande d’un Uber et la prise en charge est souvent très court (quelques minutes) grâce à la géolocalisation et à la commande sur l’app. Associé au grand nombre de véhicules disponibles, cela permet aux chauffeurs Uber une forme de maraude électronique. Ce dont s’est plaint l’UNT, c’est d’une communication insuffisamment claire du Californien sur la réglementation des maraudes auprès de ses chauffeurs.

Une épingle dans le cuir d'un taureau

Mais au lendemain de nouvelles manifestations de taxis parisiens, dont certaine très violentes, cette condamnation sonne aussi comme un aveu d’impuissance. Comme une épingle plantée dans le cuir d’un taureau. La maraude était sans doute l’unique réelle faille juridique pour atteindre Uber. Ce qui pose une autre question : la poursuite judiciaire est-elle la bonne réponse face au Californien ? Les géants de la Silicon Valley et leurs armées de juristes et de lobbyistes sont passés maîtres en l’art de se développer sans jamais réellement enfreindre les lois mais en les contournant, ou en les devançant. Uber s’est même offert un conseiller de Barack Obama sur le sujet.

Quid de la transformation du travail ?

Uber est le symbole, pour le meilleur et pour le pire, de la transformation numérique de l’économie. C’est un rouleau compresseur, violent lui-aussi, qui écrase l’économie traditionnelle sur son passage. Parmi les nombreux secteurs touchés, les taxis sont en première ligne. Et il y a peu de chance que les manifestations ou micro-amendes (à son échelle) n’arrêtent la plus grosse des licornes. Ne vaudrait-il pas mieux s’interroger sur le sujet majeur de la transformation du travail par de telles plates-formes, et sur sa régulation ?

Certes, on peut se réjouir de la possibilité pour tout un chacun de travailler de façon indépendante et souple. Mais le chauffeur Uber est-il un employé du Californien, un sous-traitant, un membre de la plate-forme ? Et en fonction de la réponse, quelles règles les uns et les autres doivent-ils respecter (rémunération, assurance, licenciement…) ? Certains chauffeurs américains ont d’ailleurs intenté des class actions sur ces points.

L'exemple des taxis dublinois

Le face à face est inégal. Une preuve parmi d’autres : le 24 janvier, la plus grosse entreprise de taxis de San Francisco les Yellow Cabs, s’est placée sous protection du chapitre 11 (ce qui, aux USA, correspond au redressement judiciaire) comme l'explique le Wall Street Journal. Même dans la Silicon Valley, berceau du numérique, on a du mal à se protéger de l’ouragan. Mais c’est peut-être de notre côté de l’Atlantique que l’on peut trouver les îlots de résistance les plus efficaces. Ainsi, depuis plus de 5 ans, les taxis dublinois disposent de leur app, Hailo, équivalente à celle d’Uber. Avec un bonus : il est possible de héler un taxi en maraude dans la capitale irlandaise, et s’il est membre de Hailo, de le payer avec l’app… La transformation numérique, meilleur moyen d’uberiser Uber ?

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